fontenoy Salut avant la batailleLa bataille de Fontenoy, le 11 mai 1745, a opposé une armée française commandée par le maréchal de Saxe à une coalition Anglo-Hollando-Hanovrienne durant la guerre de succession d'Autriche. Parmi les grandes victoires opposant la Maison des Bourbons et celle des Habsbourg et dans l’affrontement entre les Français et les Anglais, Fontenoy est la plus célèbre, devenue populaire grâce à cette phrase « Messieurs les Anglais, tirez les premiers ! ». Le roi Louis XV, accompagné du dauphin de France, était de la campagne et la victoire fut célébrée par Voltaire, même si la guerre se poursuivit trois années encore, avec des succès divers, jusqu'à la paix d'Aix-la-Chapelle (18 octobre 1748).

 

 

La région de Tournai, théâtre de la bataille de Fontenoy

Tournai, traversée par l’Escaut, est une porte vers la plaine flamande et les villes de Gand et Anvers. Capitale des Francs au Ve siècle, puis rattachée au comté de Flandre, elle devient française sous Philippe Le Bel, conquise ensuite par Charles Quint, prise par Louis XIV, cédée à l’Autriche puis…enfin reprise lors de cette campagne de 1745 !

FONTENOY_Profil_retranchement_villageLouis XV est en pleine guerre de tous côtés : en 1740 guerre de Succession d’Autriche ; en mars 1744 guerre contre le roi d’Angleterre ; en avril 1744 déclaration de guerre à la reine de Hongrie. Le champ de bataille sera dans le Nord, le roi confie l’armée au Maréchal de Saxe : c’est ainsi qu’il va conquérir d’abord Tournai. La ville est bien équipée en hôpitaux et l’infrastructure est suffisante pour nourrir et loger les soldats. Le plan de bataille est élaboré en décembre 1744 pour débuter réellement au printemps 1745 : concentrer l’armée dans le nord, faire une diversion vers Mons et Charleroi et repartir soudainement vers Tournai pour surprendre les Hollandais.

Le Maréchal de Saxe s’installe

Le 6 avril 1745, Maurice de Saxe est à Lille, commandant une armée de 100 000 hommes. Pendant ce temps, le duc de Cumberland débarque à Ostende à la tête de 55 000 hommes composés d’Hanovriens, d’Anglais, d’Hollandais. Cumberland épie les Français, et constate que l’armée s’est concentrée entre Armentières et Maubeuge, déduisant que l’attaque se fera vers Mons et Charleroi. Les Alliés ferment alors les écluses d’Audenarde, en direction de Gand ; la rive droite de l’Escaut est inondée jusqu’à Condé sur Escaut sur une soixantaine de kms.

Le 25 avril 1745, 6000 Français se présentent devant Tournai en créant une sacrée surprise. Le lendemain, le Maréchal de Saxe entame le siège de la ville avec ses 60 000 hommes.

Le 28 avril 1745, le duc de Cumberland se décide à marcher vers Tournai : il veut prendre les Français à revers, les pousser vers la ville, et ainsi les battre une fois qu’ils seront pris entre deux feux…Mais le Maréchal de Saxe y avait déjà pensé et s’était organisé en conséquence ! Cumberland dispose d’une plus grande rapidité d’action…sauf qu’il est mal obéi par ses subalternes jaloux de son grade (duc et commandant à l’âge de vingt cinq ans !)…son armée ne se met en action que le 30 à Bruxelles, mettant neuf jours pour atteindre Tournai qui est seulement à soixante dix kms…un temps suffisant pour que Maurice de Saxe s’organise.

Le Maréchal décide que le combat se passera dans la plaine de Fontenoy, hors de portée des canons de Tournai. L’endroit se trouve adossé à l’Escaut, sur un carré d’un bon kilomètre et demi de côté, attaquable uniquement sur deux fronts, le village étant une articulation entre ces deux fronts, avec au nord le bois de Barri et au sud l’Escaut ; le terrain légèrement en pente, la marche de l’ennemi se faisant en montant, favorisant ainsi la défense.

En même temps, le Maréchal réorganise son armée : 20 000 hommes pour le siège ; 40 000 hommes dirigés vers Fontenoy. Il fait disposer des abattis dans le bois de Barri, fortifier le village, construire des redoutes au nord pour couvrir son armée et au sud pour fermer l’espace entre les villages de Fontenoy et Antoing. Il installe son infanterie et sa cavalerie à gauche vers le bois de Barri et à droite sur l’Escaut.

Il confie la fortification du village à M. de La Vauguyon qui dispose de huit pièces : deux bataillons et deux batteries sont placés dans la redoute du bois de Barri et le gros de l’infanterie est établie sur quatre lignes entre Fontenoy et les redoutes du bois (quatre cent trente travailleurs des régiments du Dauphin et de Beauvaisis ont œuvré, les retranchements sont achevés au bout de vingt heures). Derrière se trouve « la cavalerie sur deux lignes », « La Maison du Roy, la Gendarmerie et huit escadrons des Carabiniers sont en réserve derrière la Cavalerie ».

La bataille de Fontenoy

Le 10 mai 1745, tout est en place, les Français attendent les 55 000 hommes de Cumberland. Les « ennemis se sont installés au village de Vezon, opposé à Fontenoy », à droite sur le bois de Barri et à gauche sur l’Escaut. Les Hollandais attaquent le village de Bourgeon : les quelques cent français retranchés, abandonnent la position. Pendant la nuit et profitant du brouillard, le Maréchal de Saxe envoie un renfort de six pièces d’artillerie à Fontenoy.

FONTENOY Position dbut de batailleLe 11 mai 1745 à 4h du matin, le Roi et le Dauphin sont à pied d’œuvre et « à une heure de jour, les ennemis s’avancèrent en bon ordre vers l’armée du Roy… »

Peu avant 6 h du matin, les alliés bombardent les positions et les lignes françaises ripostent, le duc de Gramont perd la vie.

Les Hollandais reprennent leur attaque entre Fontenoy et Antoing. A 9h, ils sont à la portée de fusil de Fontenoy. Pendant une demi-heure, le feu est nourri. Ils chargent et perdent beaucoup de soldats. Le Maréchal de Saxe protège l’arrière du village avec les brigades du Royal et de la Couronne.

Les 8000 Anglo-Hanovriens avancent et subissent des pertes…en vain : « les Anglais attaquèrent trois fois Fontenoy et les Hollandais tentèrent deux fois d’enlever Antoing ». Cumberland réfléchit, modifie ses plans et tente une manœuvre dans un petit espace entre les redoutes du bois de Barri et Fontenoy. Il réorganise son infanterie « sur deux lignes épaisses, avec une troisième en réserve », sa cavalerie formant une quatrième colonne. L’ensemble représente ainsi un défilé compact de 15000 hommes.

Les armées se font face…c’est peut être là que la phrase célèbre aurait été prononcée « Messieurs Les Anglais, tirez les premiers ». En fait, les règles dans l’infanterie à cette époque étaient telles que celui qui ne tirait pas le premier, bénéficiait ensuite d’un certain avantage !

Les Anglais font des ravages, coupent les deux premières lignes françaises, avancent droit devant eux, lentement mais surement… Les Français tous corps confondus, attaquent ; ils leur font subir des pertes…mais les Anglais avancent toujours, sans ralentir la marche….les Gardes Françaises et les Gardes Suisses se dispersent…la colonne anglaise est prête à prendre Fontenoy à revers…le Maréchal de Saxe renvoie sa cavalerie à la charge…la colonne anglaise souffre mais poursuit son avancée…

FONTENOY Louis. XV et le DauphinVers 13h, les Français sont dans une phase critique…plusieurs personnes de l’entourage du roi le poussent à se réfugier de l’autre côté de l’Escaut…impossible : ce serait une défaite ! Jubé raconte « ce prince montra, en cette circonstance critique, beaucoup de confiance et de sang froid ; et sa contenance concourut à ranimer le courage des troupes…quelques boulets étant venus se perdre sur la hauteur où il était placé, Louis XV dit en souriant « qu’on les renvoie aux ennemis, je ne veux rien avoir à eux ! ».

Le Maréchal de Saxe décide alors d’engager toutes ses ressources dont la Maison du Roi, pour attaquer la colonne de face et sur les deux flancs, « les grenadiers à cheval donnent les premiers coups de sabre, les gardes françaises les premiers coups de baïonnettes…Monseigneur le Dauphin mit l’épée à la main, voulut rallier les troupes qui avaient plié et charger l’ennemi… ».

Résultat « la colonne s’arrête, hésite, se disloque ; en un moment, cette colonne anglaise qui pouvait compter 8 à 10 000 hommes est anéantie ». Il est 2h de l’après midi ce 11 mai 1745…Cumberland bat en retraite en tentant de sauver ce qui peut l’être ; le Maréchal de Saxe envoie 3000 hommes à sa poursuite « au cas où »…et satisfait de cette victoire, Louis XV se retire vers 7h du soir !

La victoire revient à …

Les pertes françaises peuvent être évaluées entre 7000 et 7500 hommes ; les Anglais, Hanovriens et Hollandais ont perdu entre 13 000 et 15 000 soldats.

La victoire est certes acquise pour la France, mais les avis divergent. D’après Louis XV, elle revient au Maréchal de Saxe ; pour le général Jubé, elle est obtenue par un moyen que Voltaire assure avoir été suggéré par le duc de Richelieu ; quant à JP Bois, elle est indiscutablement l’œuvre de Maurice de Saxe « cette bataille a suffi à faire du maréchal de Saxe un des plus grands talents militaires ». 

Bibliographie

- Colonel Frédéric Guelton, directeur de recherches et chef du département des études et de la recherche du Service historique de l'armée de Terre, historien. Article « la Bataille de Fontenoy » dans la revue « Château de Versailles de l’Ancien Régime à nos jours »

- J.P. Bois – « Fontenoy 1745, Louis XV, arbitre de l’Europe » 1996

- Des batailles et des hommes : Fontenoy, de Denis Gandilhon. Histoire & Collections, 2008.

.