Les plantes dans l’histoire des Hommes
L’ouvrage regorge de plante dont on soupçonne d’emblé le lourd impact sur la vie des hommes : le café, le thé, le tabac (ces drogues qui guidèrent les flux de la période coloniale), le coton (pensons au commerce triangulaire, à la guerre de sécession), le caoutchouc (omniprésent dans nos sociétés), l’orge (le whisky, la prohibition…), le houblon et la vigne (et leur utilisation alcoolisée depuis la plus haute antiquité, à la fois festive et symbolique ), le riz, le poivre, le cacao, la canne à sucre, la vanille, mais aussi la pomme de terre, le blé ou le maïs… Mais là encore nous sommes généralement loin de soupçonner la multitude d’application de ces plantes qui nous sont devenues familières. Qui pense que la guerre d’indépendance américaine commença par une action contre la cargaison de thé dans le port de Boston ? Qui imagine encore utiliser le tabac pour traiter les vers et autres troubles digestifs mais également les migraines et les maux de dents ? Quand on évoque le coton on songe au textile, à la révolution industrielle et aux exploitations serviles, mais qui pense au savon, à la margarine, aux cosmétiques, au chewing-gum, à l’enveloppe des saucisses et à la dynamite ? Peu de monde je suppose… En tout cas guère plus que ceux qui songeraient d’office à intégrer la culture du riz parmi les éventuels facteurs aggravant du réchauffement climatique du fait du fumage des terres des rizières avec du fumier de buffle, des tiges et des racines de riz qui émettent du méthane. Peut-être seront-ils plus nombreux à penser à Christophe Colomb quand on évoquera la route commerciale du poivre indien. Quant à la pomme de terre, si on pense aux frites et aux chips, il ne faut pas oublier son rôle crucial dans la présence de communautés irlandaises en Amérique. En effet le mildiou (maladie de la pomme de terre) entraine la grande famine irlandaise du milieu du XIXème siècle poussant à l’exode tous ceux qui le peuvent. Mais là encore l’histoire des plantes ne se démarque pas de celle des hommes et le désastre ne s’explique pas que par la maladie d’une plante : pendant que les Irlandais mourraient, leur île fournissait de belles récoltes de maïs… Récupérées par les propriétaires anglais…
Mais cet ouvrage regorge également de plantes dont nous sommes nombreux à ignorer ou sous-estimer l’importance dans notre propre histoire. Par exemple la fougère, ou plus généralement les plantes du Carbonifère qui sont à l’origine des bassins houiller et de toutes nos énergies fossiles. On ne pense pas non plus au mûrier blanc utilisé pour nourrir les vers à soie. Et on ne pense quasiment jamais au Quinquina et à ses vertus médicinales contre une des maladies les plus meurtrières au monde : le paludisme.
Notre avis
Les éditions Ouest-France nous offrent là un très bel ouvrage qui offre une approche originale de notre histoire à travers notre rapport au milieu végétal. Un thème omniprésent, parfois pas assez étudié, mais qui revient indéniablement à la mode avec la prise de conscience mondiale (ou presque) des effets néfastes de notre impact environnemental. Présentant plante par plante l’ouvrage se présente comme un petit dictionnaire qui, aux vues des très belles planches peintes pour chaque espèce, prend un air d’herbier. D’ailleurs cet ouvrage entre parfaitement dans la catégorie des beaux livres pour son degré de finition : ruban marque page, pages épaisses, très riches illustrations très colorées et variées : planches peintes, gravures, tableaux, photographies… C’est un plaisir de passer du chou au chêne, de la coca au chanvre ou du papyrus au piment de Cayenne… A chaque plante les auteurs vous invitent à vous plonger dans l’histoire de l’industrie, de la médecine, des croyances, des mythes… Un magnifique voyage dans le monde végétal à travers ce bel ouvrage littéraire qui ne nous prive que des senteurs.
Bill Laws, 50 plantes qui ont changé le cours de l'Histoire, Editions Ouest France, 2011.