pelerins ma« Tous les vrais chrétiens devraient avoir grand dépit de ce que Jésus-Christ était ainsi déshérité par leur abandon, et son pays livré à ses ennemis ». Lorsque Urbain II s'exprime le 27 novembre 1095 au Concile de Clermont en faveur d'une action militaire en Orient, son but est de libérer la terre du Christ et secourir les « frères d'Orient ». Le pape déplore les guerres que se livrent les chrétiens et se montre extrêmement critique envers la chevalerie. Il insiste sur le fait qu'elle doit, dés à présent, se mettre au service du Christ. La mentalité occidentale de l'époque, très fortement empreinte de religion voit la Terre sainte, le lieu où Jésus vécut et mourut, comme une région chrétienne par nature. La croisade apparaît donc comme une « reconquête » d'un espace géographique borné par les pas du Christ.

 

Croisade et eschatologique

L'autorité musulmane qui gouverne l'ensemble de la région depuis le VIIe siècle est plus ou moins tolérée par l'occident tant que les pèlerinages y sont autorisés. La conquête des turcs Seldjoukides à la fin du XIe siècle modifie les conditions de ces pèlerinages, les rendant plus chers et plus dangereux. Ces excès sur les pèlerins, associés aux dégradations des lieux de cultes sont perçus comme autant de châtiments envoyés par Dieu pour les punir de leurs péchés (1).

L'idée de fautes commises par les chrétiens pour expliquer la situation malheureuse de la Terre sainte est largement reprise par le pape Urbain dans son prêche, expliquant que c'est aux « peuples d'outre-monts », aux occidentaux, qu'appartient la tâche de secourir leurs frères orientaux, en rachetant leurs fautes par le pèlerinage et la lutte contre les Infidèles dans un pur esprit de charité chrétienne. A partir de cette argumentation théorique, de quelles manières le message a-t-il pu être interprété et assimilé par les foules qui se sont « croisées » et ont entrepris ce pèlerinage ? Au-delà des motivations diverses qui ont conditionné les départs, les mentalités individuelles et collectives évoluent au fur et à mesure que la croisade pénètre en Orient et que ses participants découvrent une terre qu'ils ne connaissaient jusqu'à présent qu'à travers les Évangiles et les Vies de Saints.

La théorie du discours sur le comportement à adopter au cours du pèlerinage, mise en perspective à travers une étude pratique des faits tels qu'ils se sont déroulés met en lumière un paradoxe entre une idéalisation du principe de croisade prônée à partir du Concile de Clermont, et une évolution des mœurs et mentalité tout au long de l'expédition qui s'achève véritablement en 1099.

La rémission des pêchés proposée par Urbain II à ceux qui prennent la croix est l'argument déterminant qui conditionne les départs en croisade. Un pèlerinage classique comporte toujours des « fatigues de voyage », nécessaires à ce que l'acte pieux soit accompagné d'une souffrance expiatoire (2). Ici, le pape « donne ce voyage pour toutes pénitences » qu'il met en relation avec les paroles du Christ : « Il vous faut beaucoup souffrir en mon nom (3) ». Dans un esprit millénariste, l'arrivée des croisés à Jérusalem coïncide avec la fin des Temps décrit dans l'Apocalypse. Ils sont les instruments nécessaires au passage de la Jérusalem terrestre à la Jérusa lem céleste.

Dans la Vie de Saint Conrad, écrite au XIIe siècle, l'auteur écrit qu'il désire voir la ville de Jérusalem « quoique terrestre (4) ». L'opposition - que l'on retrouve dans la conscience des pèlerins bien avant les croisades - créée par le discours entre ces deux entités, permet de différencier, sans pour autant dissocier, les deux Jérusalem : la « terrestre » que le Christ a foulé de ses pas, et la « Céleste » qui est la demeure de Dieu au ciel. Cette deuxième entité n'est accessible aux hommes qu'une fois la fin des Temps révélée et l'Antéchrist vaincu. Le développement des pèlerinages et le nombre croissant de personnes qui se rendent à Jérusalem au cours du XIe siècle est un signe tangible que la fin des Temps est attendue prochainement.

Le chroniqueur Raoul Glaber interprète ces pèlerinages comme « étant le signe de l'Antéchrist, que les hommes attendent vers la fin de ce siècle, sur la foi des divines Écritures : aussi toutes les nations s'ouvraient-elles un passage vers l'Orient qui devait être sa patrie, pour marcher bientôt à sa rencontre (5) ». Le pèlerinage, qui est traditionnellement un acte de purification individuelle, devient à l'époque des croisades une mission collective pour le salut commun, dans l'attente de l'Antéchrist qui précède celle de Dieu.

Urbain II lui-même a montré que ce voyage est nécessaire, et la libération des Lieux saints, un point impératif avant la venue de l'Antéchrist (6). La croisade s'inscrit dans la promesse faite par l'apôtre Luc dans son Évangile, que « Jérusalem sera foulée aux pieds par les Gentils (païens) jusqu'à ce que le temps des nations s'accomplisse (7) » c'est-à-dire lorsque la victoire du Christ sur l'Antéchrist entrainera la consécration et l'unification des peuples chrétiens.

La terre Sainte, de la sphère mythique au monde tangible

Jerusalem-celeste 1L'Orient est connu des occidentaux à travers les récits des pèlerins et des marchands qui y ont séjourné mais la première source d'information reste la Bible, qui donne à travers l'histoire des apôtres, une description abondante de la Terre sainte. La ville de Jérusalem et la région qui l'entoure est la plus importante, d'un point de vue quantitatif et qualitatif, de lieux saints pour les chrétiens au monde.

Dans sa chronique, Guillaume de Tyr offre une longue description de Jérusalem en privilégiant son caractère sacré au détriment de son positionnement militaire ou architectural, qu'il agrémente de citations bibliques. Il dit par exemple « que la sainte cité de Jérusalem est située sur deux montagnes, c'est pourquoi David (8) dit dans ses psaumes : Ses fondements sont posés sur les saints montagnes (9) » ; ou encore que « Jérusalem se trouve dans le nombril de la terre promise, telle que Josué (10) l'a définie ». Toute la progression des armées croisées s'articule autour d'une connaissance littéraire de l'Orient, censée pallier leurs lacunes géographiques.

La croisade se donne pour mission de libérer ces lieux saints, dont Jérusalem n'est finalement que le centre. Le domaine sacré s'étend à toute la terre que le Christ a sillonné durant sa vie, et à la terre que Dieu a promise au peuple d'Israël, dont les chrétiens sont les descendants légitimes. Raymond d'Aguilers met en parallèle la longue pérégrination des croisés vers Jérusalem et la marche des Hébreux vers la Terre promise lors de l'Exode (11).

Les difficultés sont montrées comme étant les conséquences des fautes des hommes, comme cela a été le cas pour les Hébreux dont la marche dans le désert a été longtemps prolongée par suite de leurs infidélités. Il incombe aux chefs de la croisade, comme cela fut le cas pour Moïse, de payer pour ces erreurs, et comme lui, de faire pénitence pour se racheter.

La défense des lieux saints influence directement la marche des croisés, qui cherchent à les préserver. Lors du siège de Jérusalem, Tancrède choisit d'attaquer en face de la Porte du Mont-Sion (12), alors qu'un autre emplacement lui a été donné afin de « défendre contre les Turcs cette très sainte église où Notre Seigneur soupa avec ses disciples, et leur lava les pieds ». La protection de cette église, qui se trouve être un lieu saint de premier plan revête une telle importance aux yeux des croisés qu'elle influence la coordination du siège de Jérusalem. Cette préoccupation de sauvegarde et de conservation des monuments sacrés s'explique par l'importance qu'ils revêtent aux yeux des occidentaux qui les connaissent à travers les Écritures. Ils sont leur patrimoine et font partie d'un héritage religieux, par lequel les croisés se sont représentés la Terre sainte, et qui contribue à l'imaginaire fabuleux de la Terre promise.

La redécouverte de la Terre sainte

Les chroniques latines apportent une vision controversée de l'Orient. Elles soulignent le paradoxe entre la rudesse du climat, et la splendeur des villes. Dans la liste des prises de guerres, les camps ennemis regorgent toujours « d'or et d'argent ». Les richesses de l'Orient sont systématiquement associées au merveilleux, corroborant la perception purement mentale que s'en font les occidentaux. À l'inverse d'un Occident médiéval agraire et féodal, l'Orient est citadin et commercial (13), c'est une terre d'opulence.

Guillaume de Tyr décrit la Judée et la Palestine comme « les pays des délices, joyaux des joyaux parmi les nations (14) », dont Jérusalem est « l'ombilic (15) ». Ce n'est qu'à partir du moment où les croisés se trouvent eux-mêmes en Syrie et en Palestine qu'ils se rendent compte du paradoxe entre l'imaginaire qui entoure cette terre d'Orient et la réalité géographique. Les terres orientales, comprises entre Constantinople et Jérusalem ne se sont pas révélées être des terres d'abondance « où coule le lait et le miel (16) ». Dès leur arrivée en Anatolie, les premiers croisés souffrent de la faim et de la soif et les troupes sont décimées par la dysenterie.

L'arrivée devant Antioche, première ville de Syrie est vue comme la fin des difficultés : « Après qu'ils eurent échappé à cette mésaventure (la traversée de l'Anatolie), ils arrivèrent dans un pays très plantureux et très beau, plein de bois, de rivières, de prairies, et de terres cultivables. C'était près d'Antioche (17) ». Tout le temps que dure le siège de la ville, les croisés relèvent le contraste entre la représentation biblique de cette terre et la réalité telle qu'ils la vivent. Ces derniers qui pensent avoir affaire en orient à un climat chaud et sec, « meurent de froid (...) car ils ne cessait, jour et nuit, de pleuvoir une pluie forte et drue ».

Si le voyage entre Antioche et Jérusalem se déroule dans des conditions plus favorables, notamment grâce à un meilleur approvisionnement, cette province ne correspond pas non plus à leurs attentes. Dans sa description de Jérusalem, Guillaume de Tyr dit « que le lieu où elle est construite est très aride » et qu' « il n'y a aucune eau dans la ville (18) ». Les barons ne peuvent pas tenir un siège prolongé à cause du climat trop chaud en ce début l'été, raison pour laquelle ils décident de prendre la ville d'assaut, mais le matériel leur manque : « Le désert n'est pas très éloigné (...) et il semblait impossible de trouver alentour les arbres dont ils avaient besoin (19) » pour construire des machines de siège.

Une fois arrivés en Palestine et la ville de Jérusalem « libérée », les croisés sont les maîtres d'un pays compris entre le nord de la Syrie et la Jérusalem « terrestre » au sud, espace géographique à la fois immense et hostile, où la menace conjuguée des turques et des fatimides d'Égypte reste extrêmement présente. Dès lors que Jérusalem est redevenue chrétienne, la majorité des croisés, déçus des perspectives que leur offre la Terre sainte et incapables de s'acclimater, choisissent de rentrer chez eux.

Un retour à la réalité difficile

retour bohemond italieAvec l'élection d'un roi et d'un Patriarche (20) « Franc », on peut véritablement parler d' « État féodal » sur le modèle occidental dans le nouveau Royaume de Jérusalem. Godefroy de Bouillon établit une loi qui stipule que « celui qui aurait gardé en paix, un an et un jour, ce qu'il avait en sa possession, en serait définitivement propriétaire ». Lors de la prise de Jérusalem, il suffit aux croisés de déposer un objet personnel sur le palier d'une maison pour se l'approprier : « les barons mettaient leurs bannières (...) les chevaliers de moindre importance y mettaient leurs écus, les gens de pied y mettaient leurs chapeaux ou leurs épées... (21) ».

L'établissement de nouvelles dynasties en Orient ne concerne qu'un nombre restreint de seigneurs et de barons. Hormis les vassaux directs de Godefroy de Bouillon, de Bohémond de Tarente et de Baudouin du Bourg, qui ont chacun leurs principautés, la plupart des soldats et des pauvres décident de quitter la Terre sainte. Le duc de Normandie et le comte de Flandres, deux des principaux chefs de la croisade repartent ensemble « en leur pays par la mer ». Raymond de Saint-Gilles, après avoir déclaré dans un premier temps « qu'il s'en irait de l'autre côté de la mer, là ou il était né » si la couronne du royaume de Jérusalem ne lui revenait pas, décide finalement de rester en Orient, et de se constituer lui-même un fief dans les environs de Tripoli.

Son cas reste cependant une exception puisqu'il est l'homme le plus fortuné de la croisade, le seul capable de recruter des troupes et de financer des campagnes militaires. Le retour au pays semble avoir été le lot commun de la grande majorité des croisés. Le paradis ne s'est pas offert à eux et la libération de la Jérusalem terrestre n'a pas entraîné la venue de l'Antéchrist. Après la prise de la ville, les pèlerins effectuent une visite des lieux Saints qui ne s'inscrit que dans la tradition classique du pèlerinage en Palestine.

Le départ massif des croisés entraîne des difficultés pour les nouveaux gouvernements en place qui cherchent à structurer le royaume. Pierre l'Ermite lui-même, icône suprême de la croisade, quitte la Terre sainte à la fin de l'année 1099, emportant avec lui la fin de l'espérance eschatologique. L'historien Jean Richard écrit qu'après la prise de la ville sainte, « Jérusalem est purement chrétienne mais presque vide (22) ». Dès son élection, Godefroy de Bouillon se voit obligé d'appeler à l'aide les autres barons, en les implorant de rester. Il en vient même à rappeler certains qui sont déjà sur la route du retour et dans le même temps, il dépêche plusieurs courriers en occident pour demander le départ de nouveaux croisés, notamment à l'archevêque de Reims, Manassès II de Châtillon (23).

Ces nouveaux croisés qui arrivent à partir de 1101 en Palestine ne sont pas tous des soldats (24), et sont même majoritairement des pèlerins qui après avoir visité les lieux saints, rembarquent pour retourner chez eux. Dans l'esprit occidental, la croisade n'est pas le point de départ d'une conquête territoriale mais un cadre offrant une assurance sécuritaire et protectionniste pour la réalisation du pèlerinage en Terre sainte, fonction qui donne naissance au XIIe siècle aux différents ordres militaires.

L'avenir du royaume franc en Terre sainte est menacé dès sa naissance par manque d'effectifs. Guillaume de Tyr rappelle qu'à l'époque où Godefroy de Bouillon est élu « presque tous les barons, qui étaient venus à ce pèlerinage, s'en étaient retournés en leur pays » et leurs troupes avec eux. Godefroy et Tancrède disposent selon lui de « trois cents hommes à cheval et deux mille à pied (25) » mais l'historien allemand Röhricht pense que les chiffres les plus sérieux sont ceux donnés par Raymond d'Aguilers (26) qui parle de douze mille chrétiens à Jérusalem, dont mille deux cent ou mille trois cent chevaliers. L'effectif réel, probablement compris entre ces deux estimations ne permet de toute façon pas d'appuyer une conquête massive de la région autour des nouveaux états francs, mais reste suffisant pour protéger et consolider les premières possessions, permettant l'érection d'un espace chrétien entre les villes d'Antioche et d'Édesse au nord, et de Jérusalem et Ascalon au sud.

La grande espérance eschatologique n'a pas anticipé l'après croisade, principal facteur des départs massifs des premiers croisés. Pour pallier aux nombreux retours, les nouveaux maitres de la Terre sainte doivent séduire les occidentaux en faisant valoir les arguments financiers d'une installation en Orient. Le premier Patriarche franc de Jérusalem, Daimbert, demande « l'envoi de forces latines pour défendre Jérusalem » tout en rappelant, comme l'esprit du début de croisade le prônait, que la défense de la Terre sainte doit être le devoir de chaque chrétien. Ce discours, largement relayé et repris par la papauté est l'amorce d'une longue tradition de départ pour les chevaliers occidentaux qui viennent aux XIIe et au XIIIe siècles, s'établir de manière définitive en Orient.

Bibliographie

- Les croisades en Terre sainte: Délivrer le tombeau du Christ, de Julie Lorang. 50Minutes, 2015.

Croisades et pèlerinages : récits, chroniques et voyages en Terre sainte, de Danielle Régnier-Bohler. Robert Laffont, 1997.

La première croisade : libérer Jérusalem, de Jacques Heers. Tempus Perrin, 2002.

Légendes

(1) Tous les chroniqueurs occidentaux s'accordent sur ce point et montrent que la croisade est l'instrument de Dieu pour rétablir le cours normal de l'histoire après la délivrance de la terre biblique.
(2) Dans les Pénitentiels médiévaux, la peine infligée au pénitent est déterminé en fonction de la faute accomplie pour en permettre l'expiation. Le pèlerinage est considéré comme une forme privilégiée de cette expiation. L'indulgence de croisade n'est que l'application de cet usage.
(3) Actes, IX, 16.
(4) Françoise Micheau, «Les itinéraires maritimes et continentaux des pèlerinages vers Jérusalem », Actes des congrès de la Société des historiens médiévistes de l'enseignement supérieur public, vol.9, 1978, n°9, p.82.
(5) Raoul Glaber, Historiae, LXXI, 1, IV, VI, p.109
(6) Version du discours de Clermont selon Guibert de Nogent, 2, I, II.
(7) Luc, XXI, 24.
(8) Psaume LXXXVI.
(9) Guillaume de Tyr, Historia, 8, 1, p.255.
(10) Livre de Josué, I, 4.
(11) Raymond d'Aguilers, Gesta, p.90-91.
(12) Situé au sud de la ville, entre la piscine des Germains et celle de Siloé.
(13) Ce parallèle est notamment dressé par Richard W. Southern dans, Western views of Islam in the Middle Ages, p.7.
(14) Jérémie, 3, 19.
(15) Ézéchiel, 5, 5 ; 38, 12.
(16) Nombres, 13, 28.
(17) Guillaume de Tyr, Historia., p.105.
(18) Guillaume de Tyr, Historia, 8, IV, p.261.
(19) C'est un homme de la région qui leur indique une vallée éloignée où ils pourront trouver du bois, "à six ou sept milles de là" toujours selon Guillaume de Tyr.
(20) Daimbert est élu Patriarche de Jérusalem en 1099 et le pape Pascal II lui accorde son soutien contre les prétention d'Arnoul, évêque de Marturano.
(21) Guillaume de Tyr, Historia, 8, XX, p.285.
(22) Jean Richard, L'esprit de la croisade, p.32.
(23) Roman de Godefroy de Bouillon, v.21665-21666.
(24) Au sujet des différentes foules de pèlerins qui se rendent à Jérusalem après 1099, voir Jacques Heers, La Première Croisade, p.261-265.
(25) Guillaume de Tyr, Historia, 9, XIX, p.317.
(26) Röhricht, CXXVI, p.184, n°1.

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