Mystérieuse momie des Martres-d'Artière (Auvergne)

Histoire de France | La France des Lumières

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Le 4 Février 1756 c’est aux Martres-d’Artière, en Auvergne, que des paysans bêchant leur champs découvrent fortuitement un tombeau vouté contenant un sarcophage monolithique rectangulaire et quelques inscriptions incompréhensibles. Sous le couvercle scellé à l’argile, on trouva une bière en plomb. A l’intérieur on découvrit le corps d’un enfant momifié, «embaumé à la façon des Egyptiens», qui avait miraculeusement gardé toute sa fraicheur.

 

Une stupéfiante découverte

La peau blanche, la chair et jusqu’aux oreilles et la langue avaient gardé toute leur souplesse. «L’œil même jouissoit de tout son brillant» rapporte l’abbé Ordinaire. Le visage était intact et l’enfant ne semblait qu’endormi. Le baume dégageait une odeur agréable et persistante. Stupéfaits par cette découverte, les villageois y voient immédiatement la dépouille d’un saint : le corps est déposé dans une rivière pour le garder au frais tandis que les «pèlerins» défilent. La dépouille est ensuite transportée d’églises en églises où elle est malmenée, certain la détruisant pour garder quelques reliques : la langue et des dents sont arrachées, les bandelettes et la peau du front découpées… Seul l’évêque de Clermont prend l’initiative de mettre fin à ces extravagances et donne l’ordre d’inhumer le corps.

Un apothicaire de Clermont-Ferrand analyse la momie, il remarque que la momie est un enfant de 10 à 14 ans, il  n’a pas été éviscéré mais a été embaumé avec des produits résineux et entouré de bandelettes en chanvre. La momie a subit un traitement similaire à celles d’Egypte, avec de nombreux aromates, des huiles, du bitume de Judée ou du pissasphalte. Les articulations avaient gardé leur souplesse et tous les organes internes étaient encore mous.

Momie sarrasine ou gallo-romaine ?

L’enfant est ensuite réinhumé au cimetière du village jusqu’à  ce que Versailles demande à ce qu’il soit envoyé au Muséum de Paris. Après toutes ces vicissitudes la momie s’est considérablement dégradée, le voyage achève le processus de destruction. Une fois étudiée la momie est considérée comme un jeune arabe datant des incursions sarrasines.

Le cercueil de plomb fut vendu pour couvrir les frais de justice. De nos jours la momie est conservée dans les dépôts du Musée de l’Homme. Le type vouté du tombeau décrit, les découvertes postérieures de sarcophages en plomb trouvées dans la région, laissent à présent penser que le jeune homme était le fils d’un aristocrate gallo-romain. Cela dit la conservation exceptionnelle reste un mystère, elle rappelle la momie chinoise de la tombe 168 de la dynastie Han qui, immergée dans un bain de mercure et de sels, avait également gardé toute sa souplesse. Mais est-ce le cercueil de plomb qui a si bien protégé cette momie auvergnate ? Une parfaite étanchéité du sarcophage ? Ou peut-être les remontées de gaz carboniques que l’on remarque à cet endroit ?

Il est regrettable que cette momie, qui fit beaucoup parler d’elle, ne fut pas plus étudiée et le tombeau fouillé.

Sources

- Le Puy-de-Dôme au soir de la Révolution, d’après le manuscrit de N. Ordinaire, texte établi et annoté par A. Poitrineau, Publications de l’Institut d’Etudes du Massif Central, 1989.

-  Malte – Brun, Le Puy-de-Dôme, Les éditions du Bastion, 1882 (réed. 1988)

-  Soto-Heim (Patricia), « La momie des Martres d’Artières (Auvergne) », Les dossiers d’archéologie, n° 252, pp. 54-55.

 

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