Les Premières Dames de France depuis 1959

Histoire de France | Femmes célèbres de l'histoire de France

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Depuis la Ve République, le Président est le personnage pivot de la vie politique française. Mais qu’en est-il de la Première Dame de France ? C’est le titre porté usuellement par l’épouse de l’heureux résidant du palais de l’Elysée. Ces dames n’ont pourtant pas de titre officiel, ni de statut. Avant la Ve République, elles étaient pratiquement effacées. Mais depuis elles jouent un rôle en public, elles sont présentes lors des dîners officiels au palais de l’Elysée, souvent lors des voyages diplomatiques à l’étranger. Si certaines sont restées effacées et en retrait, d'autres se sont affirmées par des engagements politiques ou humanitaires, à l'image de leurs homologues américaines.

 

Les première Première dame de France

Yvonne De Gaulle (1959 à 1969)

Cette dame que l’on surnomma « Tante Yvonne », née en 1900, est issue d’une famille d’industriel de Calais, ville où son frère fut maire. Après des études chez les dominicaines à Asnières, elle épouse Charles de Gaulle en avril 1921. Dès 1934, ils s’installent dans la propriété « La Brasserie », rebaptisée « La Boisserie » à Colombey-les-Deux-Eglises. Elle et ses trois enfants suivent le président pendant la guerre. En 1948, elle crée la Fondation Anne de Gaulle à Milon la Chapelle en mémoire de sa fille, née handicapée.

Catholique, discrète, elle menait une vie simple pendant la présidence de son mari, l’influençant en matière de morale et veillant à ce que l’on tint à l’écart du gouvernement des personnes divorcées ou coupables d’adultère.

En 1962, le couple fut la cible de la tentative d’attentat du Petit Clamart. D’avoir menacer la vie d’une femme, l’instigateur de cette tentative d’assassinat fut fusillé. Lors de la démission du Général en 1969, ils se retirent à La Boisserie. Veuve en 1970, elle y vivra jusqu’en 1978, puis entrera à la maison de retraite des sœurs de l’Immaculée Conception à Paris. Elle s’éteint au Val de Grâce en novembre 1979.

Claude Pompidou (1969 à 1974)

Née en 1912, issue de la bourgeoisie bretonne, elle fait des études de droit à Paris, puis épouse Georges qui est dans l’enseignement, en octobre 1935 et adopte un fils Alain Pompidou.

Appréciant la poésie et l’art contemporain, elle collectionne les œuvres des artistes de son époque, notamment Yves Klein. Présidente d’honneur du Centre d’Art Contemporain de Cajarc dans le Lot, et possédant une maison dans la région, le couple y recevait leurs amis dont Françoise Sagan, Pierre Soulages, Bernard et Annabelle Buffet.

A l’Elysée, Claude surnommée Bibiche, introduit un style plus moderne, ce qui n’est pas vraiment la coutume...C’est pratiquement la seule Première Dame qui ne « se fera jamais » à l’ambiance du palais.

La fondation Claude Pompidou dont elle fut présidente pendant plus de trente ans a pour but de venir en aide aux personnes âgées, aux malades hospitalisés et aux enfants handicapés. Claude fait construire et gère quinze établissement pour personnes âgées et handicapées, ainsi qu’une maison pour enfants malades. A sa mort en juillet 2007, Bernadette Chirac deviendra en septembre la nouvelle présidente de la Fondation Claude Pompidou.

Anne Aymone Giscard d'Estaing (1974 à 1981)

Descendante des Sauvage de Brantes et des princes de Faucigny-Lucinge, elle fait ses études à l’Ecole du Louvre et devient Madame Valéry Giscard d’Estaing en décembre 1952, ils auront quatre enfants. Très active dans la campagne présidentielle de son époux, elle s’occupe aussi d’un club d’investissement féminin.

Surnommée Madame DQ « Dignité-Qualité » par le Canard Enchainé, elle représente Valéry lors de manifestations comme les fêtes de Jeanne d’Arc à Orléans en 1975, le centenaire de l’Institut français d’Archéologie orientale au Caire en 1980 et accompagne son époux pour les vœux aux Français le 31 décembre 1975. Elle disposait d’un bureau à l’Elysée et recevait régulièrement les femmes membres du gouvernement pour évoquer les questions sociales.

Parmi ses autres attributions, elle fut conseillère municipale de Chanonat dans le Puy de Dôme entre 1983 et 1995 et organise chaque année une soirée de bienfaisance au Château de Versailles, au profit de la Fondation pour l’Enfance, qu’elle a créée en 1977.

Des Premières dames plus politiques

Danielle Mitterrand (1981 à 1995)

Née en 1924 à Verdun, issue de parents enseignants militants de la SFIO (son père est révoqué par le gouvernement de Vichy) installés à Cluny, elle passe son bac à Annecy en 1941. Ses parents hébergeant des maquisards, sa sœur servant de « boite à lettres » dans la Résistance pour le mouvement national des prisonniers de guerre, Danielle s’engage dans la Résistance comme agent de liaison et fut présentée à son futur mari : François "Morland" Mitterrand, qu’elle épouse en octobre 1944, ils auront trois fils.

Pendant la présidence de son mari, femme d’action, elle s’engage dans une politique pour le tiers monde (Fidel Castro, guérilleros salvadoriens) qui a souvent mis son mari dans des situations politiques délicates.

Elle créa en 1986 la Fondation France Libertés, organisation humanitaire, destinée à répondre aux appels de détresse de femmes et d’hommes opprimés. Elle soutiendra le peuple tibétain, luttera contre l’apartheid en Afrique du Sud, prendra position pour les Kurdes et les peuples indiens d’Amérique Latine, sera l’une des premières à se rendre compte du fléau qu’est le sida en Afrique. Elle s’intéresse de près à l’éducation et milite pour la notion de richesse mais non pas la richesse-argent. Provocante, elle critiquera ouvertement la politique de Jacques Chirac et s’opposera même à une partie de sa famille en prenant officiellement position pour le NON au référendum européen en 2005.

Bernadette Chirac (1995 à 2007)

Née à Paris en mai 1933, de famille noble originaire des Trois Evêchés (Toul, Metz, Verdun), propriétaires industriels (fabricant de porcelaine et émaux), elle est apparentée aux Chodron de Courcel, une famille catholique très pratiquante.

Son père mobilisé en 1939, puis fait prisonnier, elle fuit avec sa mère auprès de la grand-mère, comtesse au château de Coudène dans le Lot et Garonne. Finissant sa scolarité à Paris, elle a comme condisciple Sylvie Joly (future comédienne), puis entrera à Sciences Po en 1950 où elle fera la connaissance de son futur mari. Mariée en mars 1956, malgré les réticences de sa famille, Jacques étant d’un milieu différent, ils auront deux filles dont Claude conseillère en communication de son père, mariée à Thierry Rey, judoka, puis une petite vietnamienne depuis 1979, mais sans adoption. A partir de 1972, elle se lance dans une licence puis une maîtrise en archéologie et travaillera sur des chantiers de fouille à Vaison La Romaine.

Sa carrière politique débute en 1971 comme conseillère municipale d’une petite commune Sarran en Corrèze, puis conseillère générale de la Corrèze de 1979 à 2004. Elle fera avancer les développements dans sa région : LGV Poitiers-Limoges et interviendra dans la nouvelle carte judiciaire contre la suppression du TGI de Tulle.

Suite aux problèmes de santé de sa fille aînée Laurence, Bernadette se lance en 1973 dans l’amélioration des conditions d’hospitalisation concernant les enfants et les adolescents.

En 1990, elle fonde l’Association du Pont Neuf destinée à favoriser les échanges entre jeunes des pays de l’est et de la France et sera la présidente du Festival international de la Danse. En 1994, prenant la présidence de la Fondation des Hôpitaux de Paris – Hôpitaux de France, elle reprend l’opération des Pièces Jaunes avec l’incontournable « TGV pièces jaunes ». Membre du Centre International pour enfants disparus et sexuellement exploités, elle prend aussi la succession de Claude Pompidou en septembre 2007 à la tête de la Fondation portant son nom.

Elle donnera son avis lors de la dissolution de l’Assemblée Nationale en 1997, devient un des atouts de son époux pour la campagne 2002, est l’une des pièces maîtresses de la future UMP, aux côtés de JP Raffarin et milite pour la réconciliation des « Chiraquiens » et des « Sarkozystes ». Elle dira de Nicolas Sarkozy : « il est fantastique, a été formé à l’école de Jacques Chirac, c’est un excellent orateur, il a un grand charisme » et partira au front pour sa future réélection.

Caractérisée par son allure « vieille-France » avec son éternel sac-à-main, c’est l’une des rares Premières Dames à ne pas se plaindre des contraintes et du rythme mondain du palais de l’Elysée ; Bernadette Chirac est fait Chevalier de la Légion d’Honneur en mars 2009 et dame de l’Ordre de Malte !

Des Premières dames à l'épreuve de la modernité

Cecilia Sarkozy (2007)

Née en novembre 1957 à Boulogne Billancourt, son statut de Première Dame sera particulièrement court : six mois.

D’origine Moldave par son père et Espagnole par sa mère, elle démarre des études de droits à Paris, fait des petits boulots et devient assistante du sénateur de l’Indre. Elle épousera Jacques Martin en août 1984 à la mairie de Neuilly, Nicolas Sarkozy étant maire à cette date. Remariée à Nicolas Sarkozy en octobre 1996, ils auront un petit Louis en 1997.

En mai 2005, elle confiera à Télé Star : « je ne me vois pas en first lady, cela me rase. Je ne suis pas politiquement correcte. Je me balade en jean, en treillis ou en santiags. Je ne rentre pas dans le moule ». Dès lors, elle n’apparait plus aux côtés de son époux, mais devient une personnalité connue des médias, en tant que membre des cabinets ministériels de son mari, et fera régulièrement la une des journaux.

Elle disposait d’un chef de cabinet et d’une attachée de presse, et aurait introduit auprès de son mari, différentes personnalités politiques. Elle a participé aux négociations de libération de médecin et infirmières bulgares à Tripoli, et promue citoyenne d’honneur de Sofia.

Carla Bruni Sarkozy (2007 à 2012)

Née en 1967 à Turin, de parents musiciens (son père biologique étant un homme d’affaire installé au Brésil), la famille s’installe en France vers 1974 suite aux enlèvements faits par les Brigades Rouges italiennes. Elle apprend le piano puis la guitare, fait ses études dans des internats privés en France et en Suisse, puis des études d’architecture à Paris, elle devient mannequin, puis top model en 1988, fera du cinéma en 1995, puis se lance dans la musique.

En 2006, elle portera le drapeau italien pour le lever des couleurs, à la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques d’hiver à Turin. Elle aura un fils en 2001 et fera la connaissance de Nicolas Sarkozy en novembre 2007, qu’elle épousera en février 2008.

Elle dispose d’un bureau à l’Elysée, dans « l’aile de Madame », dans le prolongement des appartements privés et a son secrétaire particulier. Elle accompagne le président dans ses visites d’Etat, notamment au Royaume Uni, elle a représenté le Président lors de la visite du Dalaï Lama en France.

Elle s’engage dans le domaine caritatif, plus particulièrement dans la lutte contre le Sida et devient l’ambassadrice mondiale pour la lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme. Elle prend également part à la lutte contre le port des fourrures. Participant à la libération de femmes dans des pays en guerre, elle est élue dans le premier tiers des « femmes les plus puissantes dans le monde ».

Valérie Trierweiler (2012-2014)

Née Massonneau en Février 1965, Valérie Trierweiler est issue d'une modeste famille angevine. Après des études littéraires et universitaires, elle entame une carrière journalistique, essentiellement pour le magazine Paris-Match. Elle y rencontre Denis Trierweiler, qu'elle épouse en 1995. Par la suite, elle anime ou participe à plusieurs émissions politiques de télévision.

Au milieu des années 2000, elle entame une liaison avec François Hollande, alors premier secrétaire du parti socialiste. Elle divorce en 2007 tout en conservant le nom de son ex-mari. Lorsque son nouveau compagnon devient candidat à la présidence de la République, elle participe activement à sa campagne. Après la victoire de François Hollande se pose la question de son statut. En effet, elle n'est pas remariée, refuse le titre de « Première dame de France » et entend poursuivre ses activités professionnelles.

Elle s'installe néanmoins à l'Elysée, où elle dispose d'un petit cabinet de collaborateurs et d'un chauffeur. Elle accompagne le président lors du premier voyage officiel aux Etats-Unis, ou les médias américains lui attribuent le titre de « first girlfriend » en raison de son statut matrimonial.

Dans l'entre deux tours de la campagne législative de 2012, elle soutient ouvertement l'adversaire de Ségolène Royale, ex-compagne de François Hollande, par un tweet devenu célèbre. L'affaire provoque des remous au sein du parti socialiste et des tensions dans la famille du Président. Ayant fini par endosser le rôle de Première dame, Valérie Trierweiler, elle n'hésite pas à prendre des positions politiques, notamment lors de « l'affaire Leonarda ».

Sa relation avec François Hollande prend fin en janvier 2014 après que la presse ait révélé une liaison entre le Président et une actrice. Après avoir quitté l'Elysée, Valérie Trierweiler reprend ses activités journalistiques et s'engage dans plusieurs organisations caritatives. En septembre 2014, la publication de son livre autobiographique Merci pour ce moment fera grand bruit.

Brigitte Macron (2017- ...)

L'arrivée de Brigitte Macron à l'Elysée en 2017, dans le sillage du président nouvellement élu Emmanuel Macron, marque le retour d'un style plus conventionnel et consensuel de « Première dame ».

Née Trogneux en avril 1953, Brigitte Macron est issue d'une famille plutôt bourgeoise d'Amiens. En 1974, elle épouse André-Louis Auzière, avec qui elle aura trois enfants. Après avoir passé le Capes de Lettres modernes, elle enseigne le français et le latin dans un lycée privé. Elle y fait la connaissance d'un lycée, Emmanuel Macron, avec qui elle entame une relation amoureuse. La différence d'âge entre les deux amants fera scandale.

Après son divorce, elle épouse E. Macron en 2007. Lorsque son époux se lance en politique en 2012, son couple attire rapidement l'attention des médias. Le couple fait régulièrement la "une" des médias, s'affichant dans une forme de normalité conjugale. Cinq ans plus tard, Brigitte Macron occupe une place prépondérante dans la campagne présidentielle de son mari.

Après la victoire d'Emmanuel Macron en mai 2017, elle entre à l'Elysée, où elle dispose de l'aile Madame, occupée par les « Premières dames » depuis Cécilia Sarkozy. Le couple présidentiel souhaite la mise en place d'un statut de « Première dame » sur le modèle américain. En lieu et place, une charte de transparence précise les fonctions de la conjointe du président, notamment sur la scène internationale.

Volontiers ambassadrice de la haute couture française, Brigitte Macron s'inscrit alors dans les pas de Bernadette Chirac, et devient présidente de la Fondation des Hôpitaux en 2019, et participe à la décoration du palais de l'Elysée. Elle s'exprime publiquement de temps à autre sur des sujets de société, notamment contre les exclusions (handicap, à l’éducation et à la maladie) et les violences faites aux femmes.

 

Toutes ces Premières Dames de France, si différentes les unes des autres, ont chacune joué un rôle d’ambassadrice de la mode et se sont faites connaître pour leur action humanitaire, responsable ou présidente d’une fondation.

Bibliographie

- Les Premières Dames de la Ve République – Philippe Valode. l'archipel, 2010.

- Premières Dames, de Robert Schneider. Pocket, 2016.

 

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