Lugdunum - Lyon, capitale des Gaules

Patrimoine | France : Sud-Est

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La ville de Lyon, ancienne capitale des Trois Gaules portant le nom de Lugdunum durant l'antiquité, est une métropole située au confluent du Rhône et de la Saône, dans la Région Rhône-Alpes. La ville bénéficie d’une situation géographique privilégiée, entre la Méditerranée et le Nord, et au carrefour de l’Allemagne, la Suisse et l’Italie. Rattachée à la Couronne de France en 1307, Lyon devient un important centre bancaire, commercial et industriel, grâce à sa production de soie, artisanale jusqu’au XIX siècle. Durant la Seconde Guerre mondiale, la ville est une place forte pour la Résistance contre l’occupation allemande. Étape gastronomique renommée, Lyon est enfin un centre touristique dynamique, et une ville universitaire et médicale réputée.

 

Lugdunum, capitale des Gaules

Lugdunum, future Lyon, était la capitale des Gaules au temps de l'Empire romain. Elle a probablement été fondée par un légat romain de César, Lucius Munatius Plancus, gouverneur de la Gaule chevelue, le 9 octobre 43 avant JC sur la colline de Fourvière. Lugdunum signifie Colline de la Lumière (la colline étant orientée à l'Est, du côté du soleil levant). La cité est positionnée au carrefour des grandes voies romaines de l'Occident, à la croisée du Rhône et de la Saône. 

La création d'une colonie romaine s'accompagne d'une déduction, qui consiste à installer dans la nouvelle ville un contingent de citoyens romains (en général des vétérans de la légion). On retrouve, à ce titre, de nombreux objets militaires dans les strates- remontant à la fondation de Lugdunum. Très vite, notamment en raison de sa position géographique, la ville se développe sur la presqu'île et les pentes de la Croix Rousse. L'agrandissement de la cité permet aux autorités d'ériger un forum, un théâtre, le temple de Cybèle, l'Odéon, des ateliers monétaires, une caserne, des termes ou encore quatre aqueducs qui approvisionnent la cité en eau pure.

Lugdunum devient rapidement et surtout grâce à la volonté impériale, la capitale des Trois Gaules avec des fonctions politiques, militaires, économiques et religieuses mais elle est également une ville d'art dont les artistes sont réputés dans tout l'Empire Romain. L'importance de la ville est également due au général romain Agrippa qui choisit Lyon comme le point central du réseau routier qu'il organise en Gaule, ce qui lui permet de devenir le chef-lieu de la province. Mais l'apogée de la cité se trouve sous le règne d'Auguste qui choisit d'organiser le culte impérial à Lugdunum (notamment par la création d'un autel sur les pentes de la Croix Rousse en 12 avant J-C) ce qui confère au légat de la ville un pouvoir supérieur à celui des autres provinces et fait de Lyon la Capitale des Gaules.

Lugdunum, berceau du Christianisme

A Lugdunum, la religion est présente dans tous les moments de la vie publique et privée. Les inscriptions et les sépultures retrouvées montrent la coexistence de trois groupes : les divinités gauloises, qui conservent parfois leurs noms celtes mais qui sont souvent assimilées à une divinité romaine proche ; les déesses et les dieux gréco-romains, dont le nom est assorti de qualificatifs ; enfin, les divinités étrangères importées à Rome d'Egypte, d'Asie Mineure ou d'Iran. Mais la ville devient progressivement le berceau du christianisme en Gaule. En effet, depuis le IIe siècle, un autre pouvoir est en train de naître et s'installe progressivement dans la cité, celui de l'Eglise chrétienne. Des lieux de culte vont apparaître ainsi que les sépultures des premiers chrétiens et martyrs.

En 177, l'exécution de 48 martyrs lyonnais, dont Sainte Blandine et Pothin, le premier évêque des Gaules, nous permet de voir que cette religion est déjà largement répandue et controversée. L'évêque Irénée qui succède à l'évêque Pothin est également l'un des théologiens les plus connus des premiers temps chrétiens. Le développement du christianisme s'affirme après l'Edit de Milan en 313, sous l'empereur Constantin. Il permet l'apparition d'édifices de cultes dès le IVe et le Ve siècle, notamment le groupe cathédral et le baptistère au bord de la Saône, et plusieurs basiliques funéraires construites autour de tombeaux de personnages vénérés sur la colline de Fourvière (comme Saint Just). L'adoption du christianisme ne modifie cependant pas le cadre matériel et le mode de vie à la romaine qui va se maintenir à Lugdunum au moins jusqu'au VIIe siècle.

La fin de la puissance lyonnaise

La cité va avoir une forte influence politique et religieuse pendant environ trois siècles. Grand centre de commerce et d'affaires, elle est un passage obligé pour les marchands mais est également un grand centre d'artisanat dont les productions sont réputées dans tout l'empire. La ville ne survit toutefois pas à la décadence romaine et va traverser une longue période de bouleversements.

Lugdunum est, en effet, à plusieurs reprises en proie aux flammes pour n'avoir pas choisi le bon camp dans la lutte des pouvoirs entre les généraux romains. A la fin du IIIe siècle, le déclin de la puissance romaine expose Lugdunum aux violences des invasions Barbares, notamment celles des Burgondes en 470-474, qui chassent les habitants de la ville haute. L'activité de la ville se déplace alors au pied de la colline, autour du groupe épiscopal, nouveau centre du pouvoir.

Aujourd'hui encore, les restes de la période romaine sont visibles, notamment sur la colline de Fourvière. Vous pouvez ainsi visiter l'amphithéâtre des trois gaules et les restes du forum romain et découvrir au Musée Gallo-Romain de Fourvière les restes de cette civilisation antique. Les cathédrales Saint Georges et Saint Jean, le Vieux Lyon et la presqu'île offrent quant à eux des témoignages remarquables du Moyen Age et de la Renaissance.

Lugdunum devient Lyon

Au Ve siècle, la colline de Fourvière est délaissée par ses habitants. Ce phénomène, initié avant le haut Moyen-Age, a de multiples causes (économique, pillages, perte du statut de capitale des Gaules, invasions barbares...). La population se déplace alors au pied de la colline à proximité du fleuve dans ce qui sera l'actuel Vieux Lyon. Suite à des déformations successives du langage, Lugdunum devient Lyon. Après l'épisode des invasions barbares, il faut attendre le IXe siècle et l'émergence de l'Eglise pour que la ville s'épanouisse à nouveau. En 1079 elle reçoit un nouveau statut, celui de siège du Primat des Gaules, qui redonne puissance et autorité à la ville.

En 798, l'évêque de Lyon Leidrade, un des proches conseillers de Charlemagne, ainsi que son successeur Agobard, font réédifier les bâtiments religieux et agrandir le cloître Saint Jean. La création d'une école de chantres et l'affectation d'une cinquantaine de chanoines à la cathédrale font de Lyon un centre religieux influent et le lieu de plusieurs conciles réformateurs. Sa renommée est telle que des clercs viennent de l'étranger pour étudier dans la bibliothèque de la ville. Cette renommée ne dure cependant qu'un temps et Lyon connait par la suite une période chaotique due en partie à son passage dans différents royaumes (Lotharingie en 843, Francie Occidentale en 869, Provence en 872 ou encore Royaume de Bourgogne en 942).

A partir de 1032, la ville est léguée au Saint Empire romain germanique. Le royaume de France conteste le legs et une nouvelle frontière définie le long de la Saône partage la ville en deux. Lyon se retrouve alors au sein de luttes entre le comte de Forez, vassal du roi de France et l'archevêque, lié au Saint Empire. L'archevêque profite alors de la situation de Lyon et gagne en puissance, recevant du pape Grégoire VII en 1079 le titre de Primat des Gaules. A partir de cette date, la ville reprend autorité et puissance et s'enrichit de ponts et d'édifices religieux dont la cathédrale Saint Jean ou l'abbaye Saint Martin d'Ainay.

En 1173, le comte du Forez renonce, par traité, à toute possession dans la ville et alentours au profit de l'Archevêque. L'Eglise de Lyon devient alors la seule détentrice du pouvoir sur la ville. Durant le XIIIe siècle, le pouvoir temporel de l'Eglise de Lyon s'exerce sur tout le Lyonnais (taxes et territoires), et deux conciles se tiennent alors dans la cathédrale Saint Jean encore en construction. Ces conciles incitent les marchands à fréquenter la ville mais si l'activité commerciale reste locale, le commerce de l'argent y est peu développé.

La puissance religieuse de Lyon se trouve donc au XIIIe siècle mais cet état de fait ne va pas durer. L'Eglise fait en effet face à une baisse de ses revenus au profit des ordres mendiants et à la montée d'une nouvelle bourgeoisie laïque, composée de riches drapiers, pelletiers ou hommes de loi. Dès 1267, les bourgeois se rebellent contre l'autorité ecclésiastique et parviennent même à mettre en place un conseil politique constitué de cinquante magistrats. Le roi de France, lui, oblige l'archevêque à lui céder certains droits et saisit tous les organes de gouvernement de la ville, intégrant ainsi Lyon dans le royaume de France à partir de 1307.

La prise de pouvoir des bourgeois

Au cours du XIVe siècle, Lyon s'inscrit dans un réel mouvement d'émancipation vis-à-vis de l'Eglise en faveur de la bourgeoisie laïque. En 1320, Philippe le Bel revient en force en reprenant la complète autorité sur la ville. Mais, devant le mécontentement des Lyonnais, il fait marche arrière et redonne au Prélat la justice de première instance et demande aux citoyens un serment de fidélité en avril 1320. Trois mois plus tard, l'archevêque, sous la pression de Philippe V, concède aux bourgeois une charte de franchise, la Sapaudine (ou sabaudia). Cette charte permet de garder leurs privilèges et affranchit la ville de l'autorité ecclésiastique en confiant son administration à un Consulat comprenant 12 consuls élus par les maîtres de métier. Les bourgeois peuvent ainsi encadrer les consuls mais également la vie quotidienne des lyonnais, le prélat conserve tout de même la justice et quelques droits symboliques. De plus, l'organisation de la ville évolue et Lyon est divisée en 36 circonscriptions militaires et fiscales, les Pennons.

Aux XIVe et XVe siècles, l'Europe, la France, et bien sûr la ville de Lyon doivent faire face à une période particulièrement difficile. Sur fond de Guerre de Cent ans, les populations doivent affronter un climat capricieux (hivers rigoureux, étés très secs) et de nombreuses épidémies de peste. A Lyon, en plus des crues du Rhône et de la Saône, une douzaine de récurrences de la peste interviendront entre 1416 et 1550. Toutefois, la ville n'est que très peu touchée par la Guerre, elle ne subit ni pillage, ni siège et ses milices ne se battent que très rarement. Elle est cependant menacée constamment par des passages de bandes armées dans ses proches environs et ces mouvements ne prennent fin qu'en 1444.

Lyon, ville commerçante et artisanale

La prospérité va grandissante pour la ville ecclésiastique. Le commerce conduit à l'essor de l'artisanat et à la diversification des activités professionnelles, notamment dans le secteur de l'alimentation et du textile. L'économie du XIIIe siècle est, comme par le passé, dominée par les échanges locaux et l'essentiel des produits vendus ou achetés à Lyon sont destinés à la consommation de la ville et des environs immédiats. Cette économie est fortement dépendante des voies fluviales, utilisées autant que possible, et génère des installations importantes en bord de fleuve comme des ports spécialisés. En plus de contrôler le développement économique de la ville, les hommes d'Eglise entame une modification des systèmes agricoles.

En ville, les principaux corps de métier qui s'organisent tout au long de ce siècle sont les mêmes que dans les grandes villes de l'époque et le grand commerce fait des tentatives épisodiques pour s'implanter à Lyon. Il est aidé par la construction du premier pont sur le Rhône (au niveau de l'actuel pont de la Guillotière) et par les activités religieuses telles que le séjour du pape ou l'organisation de conciles qui attirent argent et corps de métiers très spécialisés. Mais ces opportunités ne sont pas saisies par les marchands lyonnais qui retournent à leurs activités locales une fois les évènements passés.

Pour aider la ville durant les périodes de troubles et contrer Genève et le duc de Savoie dans le secteur marchand, le Dauphin, futur Charles VII, accorde à Lyon en 1420 le privilège de deux foires annuelles auxquelles deux autres viendront se greffer par la suite. Durant les foires, les marchandises peuvent circuler sans être soumises aux taxes. Ces privilèges marchands attirent de nombreux étrangers, Florentins, Lombards, Allemands ou Flamands qui vont faire de Lyon la ville florissante qu'elle sera à la Renaissance. Mais malgré l'apparition de ces foires qui créent un flux de marchands, le rythme de la vie des Lyonnais repose avant tout sur le monde agricole et le marché du samedi reste le principal moment d'animation de la semaine.

Pour l'ancienne capitale des Gaules, le Moyen âge reste une période assez troublée. Malgré le développement urbain et le privilège des foires, Lyon reste enfermée sur elle-même. Il faut alors attendre la Renaissance pour voir la ville connaître un second âge d'or.

Lyon à la la Renaissance

La prospérité de Lyon ne cesse de croître pour atteindre son apogée à la Renaissance. Aux XVe et XVIe siècles, l'essor et le prestige de la ville sont incomparables. Lyon rentre alors dans une prospérité économique entretenue par l'apparition des foires et des banques qui attirent les commerçants de l'Europe entière.  Mais, en plus d'une prospérité économique, la ville s'inscrit dans la véritable mouvance intellectuelle de l'époque par la mise en place de l'imprimerie et la diffusion de l'humanisme. C'est donc la vie entière des lyonnais qui est améliorée et les visites royales contribuent à la renommée de Lyon même si les guerres de religion entament l'image de ville forte que Lyon impose depuis deux siècles.

Prospérité économique de la ville

Longtemps avantagée par sa situation sur l'axe commercial Paris-Orient (avec un détour par l'Italie et une proximité avec Genève), la ville a reçu à la fin du siècle précédent, le privilège royal de foires annuelles qui attirent des marchands venus de toute l'Europe. Grâce à ce privilège, Lyon devient l'un des principaux centres européens du grand commerce et de la banque. Chaque quartier de Lyon est lié à une activité commerciale : les imprimeurs ont leurs échoppes rue Mercière, les cordiers dans le quartier de l'Arbre sec, les banquiers à Saint Jean... Le commerce des denrées alimentaires se fait sur des barges et des chalands, quai Saint-Antoine au bord de la Saône.

C'est en effet en raison de cette prospérité commerciale que la banque se développe. C'est d'ailleurs à Lyon que s'établit la première lettre de crédit et ce sont les banquiers de la ville qui financeront largement les campagnes militaires des Valois et le train de vie de leur cour. Grâce à ce commerce de l'or, l'orfèvrerie y produit de belles pièces inspirées de la Renaissance italienne.

Mais le commerce permet également le développement de la soierie. Lyon se dote, sous François 1er, d'une industrie textile qui fera sa fortune et sa célébrité jusqu'à une période récente et on considère que vers 1550, plusieurs milliers de personnes de la région se consacrent déjà au travail de la soie.

La vie intellectuelle

Sur le plan culturel, la ville est à la Renaissance une des principales cités du livre en Europe. C'est en 1473 que Barthélémy Buyer, un riche bourgeois lyonnais, installe des typographes dans la rue Mercière. C'est là que vont se réunir de nombreux ateliers d'imprimeurs et de libraires pour fonder en 1519 la Grande Compagnie des Libraires de Lyon. Le succès est tel que la ville produit avec Paris 90% des ouvrages imprimés en 1530. Issus des typographes allemands, les artisans locaux prennent vite le relais et développent rapidement cette nouvelle activité.

Riche de très nombreux libraires et imprimeurs, la ville souffre cependant d'une crise économique dans la deuxième partie du XVIe siècle qui permettra cependant aux familles de libraires de tirer leur épingle du jeu. A partir de 1525, Lyon devient également un grand centre d'édition musicale et les imprimeurs éditent des collections très célèbres largement diffusées en Europe. L'imprimerie à la Renaissance nécessite un grand nombre de métiers très spécialisés et le développement de ce secteur à Lyon va permettre la multiplication de ces professions.

Les fondeurs de caractères d'imprimerie sont nombreux et la ville possède quelques papetiers mais l'essentiel du papier provient d'Auvergne ou du Dauphiné. La ville abrite également des métiers plus pointus comme les faiseurs d'eau forte, les faiseurs d'encre, les graveurs et les relieurs, cependant, le nombre d'enlumineurs se réduit à cette époque ce qui montre l'évolution de la décoration des ouvrages.

A Lyon, va se rejoindre les deux pôles de la Renaissance française, d'un côté l'humanisme venu du Nord et de l'autre les Arts et Lettres originaires d'Italie. C'est par les marchands italiens qu'on connait la poésie de Pétrarque et dans les familles patriciennes et chez les artisans fortunés, comme le père et le mari de Louise Labé, on s'exerce aux sonnets.

Grâce au travail des imprimeurs, particulièrement Gryphe et Tournes, on édite et parfois on traduit de nombreux textes de l'Antiquité grecque et latine. Tout bourgeois lyonnais se doit également de faire apprendre au moins une langue ancienne à ses enfants.

Cette antiquité magnifiée, on la découvre aussi dans le sol même de Lyon, témoignage d'une ancienneté qui met la ville bien au-dessus de Paris. Les première fouilles archéologiques ont lieu à cette époque sous l'égide de l'érudit Sala qui expose ses trouvailles en sa propriété de l'Antiquaille.

En 1528, on déterre, sur les pentes de la Croix Rousse, les Tables Claudiennes qui attestent de la grandeur passée de la capitale des Gaules. La médecine est également à l'honneur grâce aux recherches de Symphorien Champier ou de Rabelais qui fut médecin à l'Hôtel Dieu. Carrefour intellectuel autant que commercial, Lyon accueille aussi à cette époque Marot, Erasme, Calvin, du Bellay et d'autres.

La vie lyonnaise

Avec 60 000 habitants résidant en permanence et de nombreux marchands qui restent souvent bien après le temps des foires, Lyon est une ville importante. Cité cosmopolite, elle accueille aussi bien des Allemands et des Flamands pour le commerce des draps et l'imprimerie ou encore des Italiens pour la banque et l'orfèvrerie. La plupart de ces familles demanderont et obtiendront la nationalité française.

La ville va alors se densifier et se construire essentiellement dans la presqu'île. A partir de 1520, plusieurs quartiers vont être remaniés notamment dans le vieux Lyon et on construit plusieurs hôtels particuliers. Ces bâtiments s'organisent autour d'une cour centrale sur laquelle donnent des galeries parfois très ouvragées. Vers 1550, la ville s'étend au-delà des fossés des terreaux et sur les pentes de la Croix Rousse. Certains quais sont assainis et les habitations empiètent sur les nombreux enclos religieux.

La prospérité de la ville attire également, durant la première partie du siècle, une nouvelle population venue de la région ou de Savoie. Ce flux de main d'œuvre profite aux commerçants et à quelques artisans mais peu aux travailleurs qui se révolteront à plusieurs reprises notamment en 1529 lors de la Grande Rebeyne (violente émeute des pauvres qui représentent un dixième de la population) ou bien quelques années plus tard lors d'un conflit entre les apprentis et les compagnons de l'imprimerie envers leurs maîtres.

Ville d'imprimeurs, Lyon est également sensible aux idées de la Réforme et les thèses de Luther et de Calvin y trouvent bon accueil. La répression contre les réformés ne se produira qu'après 1538 et tournera à partir de 1548 à la persécution. En 1562, alors qu'ont commencé les guerres de Religion, la ville est brièvement occupée par les protestants qui pilleront les églises et détruiront plusieurs couvents mais la ville n'est pas mise à sac et on ne déplore que quelques victimes.

En dehors des périodes de crises, les fêtes sont nombreuses. On pratique les activités physiques sur un grand pré au confluent, on joue à la paume dans différentes salles et boules, quilles et palets roulent dans tous les quartiers. Des concours de joutes ou d'arbalète sont organisés et les visites royales viennent consolider le prestige de la ville.

La solidarité s'organise également et en 1531 à la suite de la « grande cherté » (crise économique) on met en place, de façon temporaire d'abord puis de façon définitive, l'Aumône générale qui est chargée de soulager les pauvres. Nourris, formés, éduqués, les pauvres doivent également travailler et sont envoyés en apprentissage chez des ouvriers. L'institution assure également des fonctions de police et se charge de rétablir de bonnes mœurs dans la ville en donnant une éducation gratuite aux enfants orphelins, filles ou garçons.

Entre 1515 et 1562, Lyon, riche de l'or de ses marchands et de sa renommée intellectuelle a cru pouvoir devenir la capitale du royaume. Ses espoirs furent cependant déçus : le grand commerce ne se fit plus sur la Méditerranée mais se tourna vers les Amériques ; les étrangers quittèrent la ville; les guerres de religion, les épidémies, les disettes, décimèrent la population de Lyon et de sa région. On considère qu'en 1577 la population avait diminué de moitié. Mais des hommes et des femmes de valeur ont permis à la ville d'acquérir son titre de capitale du commerce et des lettres de la Renaissance ce qui lui permettra d'entrer dans le siècle des Lumières.

Lyon à l'époque des Lumières

A partir du XVIIIe siècle, Lyon ne va plus offrir le même visage qu'au temps de la Renaissance. Les fondements de sa fortune et l'équilibre de ses activités ont évolué. L'héritage du passé n'est pas perdu pour autant, mais la capitale du grand commerce et de la banque est devenue une ville intellectuelle foisonnant des idées révolutionnaires et des Lumières. L'espace urbain évolue également, conférant aux élites et à la ville un style nouveau et moderne.

A l'époque des Lumières, Lyon devient le lieu de passage de plusieurs grands philosophes de son temps et notamment Jean Jacques Rousseau qui séjournera deux fois dans la ville mais n'en fera pas une description très alléchante, la décrivant comme un lieu où « règne la plus affreuse corruption ». Lyon va aussi souffrir de sa réputation de ville marchande et bourgeoise, synonymes d'étriquée pour beaucoup. Léonard Michon, un notable et échevin de la ville, pointe le côté peu intellectuel de ses concitoyens et Lamartine n'hésitera pas à renchérir en affirmant « cette ville est une des moins intellectuelles des villes de France parce que son génie industriel et mercantile se tourne tout entier vers le travail ».

Pourtant, il y a bien une vie intellectuelle au cœur de l'ancienne capitale des Gaules. Lyon ouvre en 1731 la première bibliothèque publique tandis que les bibliothèques privées se multiplient. La ville fait édifier un théâtre à l'italienne en 1756 qui est dirigé successivement par deux femmes. C'est également à Lyon que Rousseau s'improvise compositeur lors de son dernier séjour en 1770, là également qu'on y donna sa première représentation de Pygmalion joué avec le Devin du Village. L'académicien Charles Bordes fut un adversaire de Rousseau et l'Académie qui fut créée en 1700 par Claude Brossette fût le théâtre de débats, sur l'éducation, l'enseignement technique ou encore la peine de mort.

Lyon fût également une ville scientifique, la médecine progressa notamment grâce à l'Hôtel Dieu dont l'aménagement va réduire la diffusion des maladies, tandis que la première école vétérinaire du monde y fut créée en 1761. Elle est un centre botanique, un creuset d'expériences et vit naître le pyrographe, premier bateau à vapeur en 1783, ou encore les premiers essais de vols habités entrepris par les frères Montgolfier en 1784. Le sulfureux Mesmer fit aussi un passage, nourrissant la passion de la cité pour l'occulte. Lyon a enfin la réputation d'une ville maçonnique, la franc maçonnerie connut un essor dans les années 1730-1740. La ville a donc su aussi faire commerce d'idées et comme le disait si bien Voltaire « Le commerce des pensées est un peu interrompu en France, on dit même qu'il n'est pas permis d'envoyer des idées de Lyon à Paris ».

L'instruction du petit peuple lyonnais

Les élites intellectuelles sont donc présentes au sein de la ville mais elles ont également pour vocation d'instruire les pauvres. En 1667, Charles Démia, un prêtre originaire de Bourg, ouvre la première école gratuite à destination des enfants issus des familles les plus pauvres de la ville. Son enseignement, bien que religieux, est une véritable innovation pour l'époque et semble relativement moderne. Le prêtre a, en effet, pour vocation d'enseigner aux petits garçons et aux petites filles la lecture, l'écriture et parfois l'arithmétique qui sont des matières considérées comme utiles et leur permettant ensuite de s'élever socialement. La pratique est cependant toujours inscrite dans la religion catholique et les textes étudiés le sont également.

Charles Démia veut, par la création de ces petites écoles, permettre aux enfants de sortir de la sphère sociale dans laquelle ils sont inscrits et leur permettre de trouver un emploi honorable qui les sortira de la rue et de la misère. On fonde alors les écoles de travail qui mettent les enfants en apprentissage chez des ouvriers, marchands ou commerçants qui vont leur apprendre les rudiments de leur métier.

Mais le prêtre a bien compris que pour bien éduquer les enfants il faut aussi former les enseignants. Il fonde alors en 1680 la communauté des sœurs de Saint Charles qui forme les maîtresses d'écoles. En matière d'éducation, Lyon est une ville innovante de par la volonté de ses élites et des autorités religieuses de la ville.

Lyon dans la tourmente de la Révolution

Sous la Constituante, Lyon devient chef-lieu du département de Rhône-et-Loire, qui sera scindé en deux après l'insurrection lyonnaise. Pendant la Révolution française, Lyon prend en 1793 le parti des Girondins et se soulève contre la Convention. La ville subit un siège de plus de deux mois avant de se rendre. La répression de la Convention est féroce. Le 12 octobre 1793, le conventionnel Barère se vante de son succès en ces termes « Lyon fit la guerre à la liberté, Lyon n'est plus ». Lyon prend ainsi le nom de Ville-affranchie. Plus de 2 000 personnes sont fusillées ou guillotinées, et plusieurs riches hôtels particuliers autour de la place Bellecour sont détruits, tout comme le château de Pierre Scize.

Le 21 août 1794, la Convention nationale envoie à Lyon deux représentants, Louis Joseph Charlier et Pierre-Pomponne-Amédée Pocholle, pour réorganiser la ville et le département après les excès de la répression. Ils obtiendront notamment que la ville reprenne son nom. La prise de pouvoir par Bonaparte est perçue favorablement, comme la fin de la période noire et le retour à la paix civile. Le Consulat et l'Empire favorisent l'industrie de la soierie et portent intérêt aux inventions de Jacquard. Bonaparte fait désigner son oncle Joseph Fesch au siège archiépiscopal en 1802.

En 1804, est lancé un projet de palais impérial à Lyon (comme dans les autres grandes villes de France). En 1811, une lettre du duc de Cadore, alors ministre d'État, précise : « le palais impérial sera élevé sur la gare d'eau, le jardin sera dans la presqu'île, entre les deux fleuves, jusqu'au pont de la Mulatière ». Mais le projet n'aboutira jamais à cause des guerres dans toute l'Europe. Lyon accueille favorablement Napoléon Ier lors de son retour de l'île d'Elbe, le 10 mars 1815. Ce dernier dira, avant de repartir vers Paris : « Lyonnais, je vous aime ». Cet accueil vaudra à Lyon une réaction royaliste lors de la seconde Restauration.

L'évolution de la ville

Au XVIIIe siècle, la ville de Lyon est à l'étroit dans ses frontières historiques. En effet, la ville se limite à l'actuelle presqu'île et au Vieux Lyon. Les pentes de Fourvière et de La Croix-Rousse sont inconstructibles, car il s'agit de terrains appartenant à l'Église, et la rive gauche l'est également dans sa grande majorité (à l'exception du faubourg de la Guillotière), car elle est située en zone inondable (Brotteaux). C'est ce qui explique l'habitude des immeubles lyonnais de l'époque à gagner en hauteur.

Deux personnes vont mettre en place des plans pharaoniques pour agrandir la ville de Lyon. Morand, tout d'abord, prévoit d'assécher une partie des marais de la rive gauche et de lotir ces terrains suivant un plan en damier. Il relie ce nouveau quartier à la Presqu'île par un pont, le pont Morand. Le deuxième projet est celui de Perrache, qui projette de doubler la surface de la presqu'île en l'étendant au sud. Il mettra ce projet à exécution, mais n'eut pas le temps de le lotir et le quartier projeté ne fût pas construit.

Jacques-Germain Soufflot est chargé de la construction de la façade de l'Hôtel-Dieu en 1741, édifice qui deviendra une référence aussi bien en matière d'architecture que d'hygiène. D'un point de vue patrimonial, sa désaffectation récente en a inquiété plus d'un, d'autant que l'avenir de son musée n'est toujours pas assuré. Soufflot fournit en outre les plans pour la reconstruction, entre 1747 et 1749, de la Loge du Change, puis conçut le premier théâtre « en dur » de la ville, élevé entre 1754 et 1756, pour lequel il s'inspira de modèles italiens. Il joua aussi un rôle important dans des opérations immobilières privées comme l'aménagement du quartier Saint-Clair sur la rive droite du Rhône.

Au cours des deux siècles d'absolutisme royal, l'administration de la ville passe entre les mains des officiers royaux : d'abord les gouverneurs (recrutés notamment dans la famille Villeroy), puis lorsque ceux-ci résideront plus souvent à la Cour qu'en province, les Intendants (voir également la liste des prévôts des marchands de Lyon).

Le pouvoir se partage alors entre l'Église (Lyon garde le prestige du primat des Gaules), le Consulat (pouvoir municipal qui se compose à partir de 1764 d'un prévôt des marchands, de quatre échevins et de douze conseillers) et le Roi, dont les représentants sont le Gouverneur et l'intendant.

A Lyon, l'importance des Jésuites est également soulignée, avec le Collège de la Trinité qui forma les élites lyonnaises la ville n'ayant pas d'université. Elle possédait cependant une Chambre de Commerce (la troisième de France après celles de Marseille et de Dunkerque), qu'elle reçut en 1702 de par sa place de seconde puissance économique du Royaume.

A l'époque Classique, Lyon connait de grands changements tant au niveau urbain qu'au niveau politique et culturel. Si la ville se voit un moment destituée de sa puissance par la suppression de son nom, elle retrouve aujourd'hui une place importante au niveau national grâce à son inscription dans la modernité.

Au XIXe siècle, Lyon connait une évolution considérable et vit ainsi un véritable « âge d'or » économique grâce au commerce de la soie. La ville grandit également considérablement et commence son industrialisation mais elle doit faire face à une population qui se soulève à plusieurs reprises. De 1800 à 1872, la vie politique lyonnaise est extrêmement contrôlée, on craint également les débordements qui ont déjà eu lieu sous la Révolution Française. Après la chute de l'Empire, la ville va exprimer une culture politique radicale, républicaine et socialement modérée, qu'elle va garder jusqu'à la fin de la Troisième République.

L'Insurrection des Canuts

Si la prise de pouvoir de Bonaparte est perçue favorablement, le retour de la monarchie va voir le paysage politique se structurer autour de deux grandes forces : les ultras et les libéraux. Le peuple, totalement exclu de l'espace politique, est avide des idées libérales qui permettent une première émeute à l'annonce des ordonnances de juillet 1830, mais la crise la plus grave reste cependant la révolte des canuts en 1831 et 1834.

Dans les années 1830, le quartier de la Croix Rousse était un quartier majoritairement ouvrier peuplé d'artisans fabriquant la soie qu'on surnomme les canuts1. En novembre 1831, le contexte économique est morose et la faiblesse de l'activité de la soierie entraine également une baisse des salaires. Les canuts décident alors de demander au préfet du Rhône la mise en place d'un tarif qui permettrait d'éviter une baisse trop importante des salaires.

Les Canuts ne vont pas s'en prendre spécifiquement aux processus d'industrialisation de leur métier, notamment grâce à l'invention de la machine Jacquard, mais vont surtout revendiquer un salaire fixe alors qu'il dépend des négociants qui répercutent les fluctuations du marché à la baisse. Ces émeutes se produisent dans un contexte de révolution industrielle et de libéralisation de l'économie qui dégrade profondément les conditions de vie de ces ouvriers et artisans en les dépossédant d'un savoir-faire et en les reléguant au rang de simple force de travail, ce qui les pousse à s'organiser en vue de contester le nouvel ordre social qui s'instaure progressivement.

Ce soulèvement apparait d'un genre nouveau pour l'époque, il est constitué de travailleurs unis pour l'amélioration de leurs conditions de travail et aura un fort impact en France et en Europe. Les deux révoltes des Canuts servent d'exemples à de nombreuses autres luttes sociales du XIXe siècle et seront réprimées dans le sang.

L'assassinat de Sadi Carnot

Si les révoltes ouvrières se calment un peu par la suite, notamment grâce au décret du 24 mars 1852 qui a rattaché Lyon aux trois faubourgs de La Guillotière, Vaise et la Croix Rousse, le 24 juin 1894 le président de la République Sadi Carnot vient dans la ville visiter l'Exposition internationale qui se tient au parc de la Tête d'or. Le soir, après un banquet qu'il préside à la Bourse de Commerce, la foule attend sa présence, parmi eux, Santo Caserio, un commis boulanger à Sète ayant pris depuis la veille plusieurs trains jusqu'à Vienne puis ayant fait le voyage à pied de Vienne à Lyon. Au moment où la calèche découverte du président de la République passe devant lui, Caserio poignarde au foie le président en criant « Vive la Révolution » puis « Vive l'anarchie ». Il se fait arrêter et est guillotiné le 16 aout suivant. Le président meurt des suites de ses blessures le 25 juin 1894.

Le contexte du moment est très important pour comprendre cet attentat, en effet, les gouvernements successifs n'ont de cesse de criminaliser l'opposition sociale et les militants autoritaires et en 1892 et 1894 plus de 400 anarchistes sont arrêtés par la police. Sadi Carnot était un président haï par les anarchistes pour avoir notamment refusé la grâce à Auguste Vaillant, auteur d'un attentat à la chambre des députés. Son assassinat oblige la chambre à adopter la dernière et la plus marquante des lois scélérates visant les anarchistes et leur interdisant tout type de propagande.

La mort de Sadi Carnot produit une immense émotion dans le pays qui fit la « une » de tous les suppléments illustrés et donna lieu à un commerce important de portraits, reproductions, biographies et autres. A Lyon, des scènes de racisme vis-à-vis des Italiens se produisent. Le corps du président est ramené à Paris pour des funérailles solennelles en la cathédrale Notre Dame, il est ensuite inhumé au Panthéon le 1er juillet 1894.

Evolutions urbaines et technologiques

L'absorption des faubourgs va permettre l'intégration des industries : constructions mécaniques, industries chimiques etc... qui font que dans les années 1870, Lyon n'est plus une ville de l'activité unique. Ces activités vont elles-mêmes connaitre des évolutions techniques importantes.

Le premier domaine à bénéficier de ces améliorations est la soierie. En 1801, Joseph Marie Jacquard met au point un métier à tisser mécanique, le métier Jacquard, permettant à un seul ouvrier de manipuler le métier à tisser au lieu de plusieurs auparavant. Ceci va permettre une augmentation rapide de la productivité. Durant les deux premiers tiers du XIXe siècle, la production de soie tire la richesse de la cité rhodanienne avec des taux de croissance de 4%. La révolution industrielle pénètre peu la Fabrique qui reste une économie à fort cout de main d'œuvre, c'est pour cette raison que le nombre de métiers passe de 18 000 en 1815 à 30 000 en 1866. Les maîtres de la Fabrique contrôlent entièrement les débouchés de la production et avant 1815 l'essentiel des soies sont vendues sur le continent et dans les cours d'Europe, le circuit se déporte ensuite vers le Royaume Uni et les Etats Unis en raison des hausses douanières.

En 1855, les treize principales entreprises fournissent 43% de la soie tissée dans le lyonnais et en 1867 on passe à 57%. Le monde des entrepreneurs en soie s'élargit régulièrement avec l'expansion de l'activité.

Les évolutions techniques à Lyon se manifestent d'abord très tôt par la fondation d'un enseignement technique en 1826 avec l'Ecole de la Martinière. Cette école forme un encadrement qualifié dans des usines où le personnel est déjà bien éduqué puisque le département du Rhône est un des plus alphabétisés en France, mais les besoins en techniciens augmentant, il est créé en 1857 une Ecole centrale lyonnaise et en 1872 une école de commerce.

Les années 1870, et surtout 1880, sont marquées à Lyon par des difficultés économiques importantes. Dès 1877, La sidérurgie connait des pertes de chiffres d'affaires en raison de la baisse du prix du fer et à cela s'ajoute, en 1882, le krach de l'Union Générale qui raréfie le crédit. Lyon sort de ces difficultés à partir de la fin des années 1880 en misant sur de nouveaux secteurs d'activités et durant la vaste » Belle époque » de l'industrie lyonnaise, les investisseurs n'hésitant pas à changer l'orientation de leurs placements pour soutenir des structures nouvelles. Quatre secteurs d'activités sont les principaux acteurs de cette effervescence : l'électricité, la mécanique, la chimie et le textile.

Dans la seconde moitié du XIXe siècle, l'urbanisme du préfet Claude Marius Vaisse va modifier considérablement la ville. Des travaux d'envergure vont alors modifier la physionomie de la ville avec la création de l'Opéra, du palais de Justice, du palais de la Bourse. Le préfet fait également percer de grandes artères bordées d'élégantes façades « haussmanniennes » et fait procéder à l'aménagement du parc de la Tête d'Or. Les maîtres d'œuvres de ces transformations sont surtout l'architecte en chef de la ville Tony Desjardins et l'ingénieur en chef de la voirie Gustave Bonnet. On rénove également les ponts, on surélève les quais et on aménage trois gares dans les quartiers de Perrache. Enfin, une ceinture de fortifications est entamée en 1830 et construite tout au long du XIXe siècle pour défendre la cité contre les attaques étrangères.

La troisième république va perpétuer cette urbanisation : la création des universités, de la préfecture et de la basilique de Fourvière datent de cette époque.

Les divertissements populaires

Lyon au XIXe siècle c'est aussi l'apparition de divertissements plus populaires, notamment le théâtre de Laurent Mourguet avec Guignol et Gnafron, les cinématographies des frères Lumières ou encore les expositions internationales.

Le Guignol est une marionnette française créée à Lyon en 1808 par Laurent Mourguet, alors ouvrier en soie. Les temps étant durs pour les canuts, il décide de devenir marchand-forain pour survivre et utilise un Polichinelle, marionnette en vogue à l'époque, pour attirer la clientèle. Il délaisse rapidement Polichinelle et crée ses propres marionnettes : Gnafron puis Guignol. Ce dernier personnage prend le parti des petites gens et clame l'injustice sociale en dénonçant les bourgeois comme les autorités régionales ou nationales.

Véritable « gazette » populaire, l'engouement de la population pour ces marionnettes se traduit par l'installation d'un théâtre de marionnettes. Dans les spectacles, Guignol représente l'image du lyonnais pudique et laborieux, mystique et travailleur. Il connait un grand succès populaire à partir des années 1830 et à la fin du XIXe siècle, la bourgeoisie lyonnaise récupère ce personnage et transforme ses histoires en spectacle pour enfants.

Le cinéma à Lyon

En février 1895, Auguste et Louis Lumière déposent la marque d'un appareil servant à la fois de caméra de prise de vue et de projecteur : le cinématographe. Le 22 mars 1895, le public assiste à la première démonstration de cet appareil avec la projection de la « Sortie d'usine ».

Ce processus vise dans un premier temps à concurrencer le Kinétescope de Thomas Edison. Après de nombreuses expérimentations de ce prototype, le cinématographe-type est accompagné, en 1897, d'un modèle simplifié et moins onéreux destiné uniquement à la projection. La production artisanale de quelques rouleaux de pellicule au tout début de 1896, permet le tirage de copies pour l'ouverture d'une salle au 1 rue de la république à Lyon et le tournage de quelques nouvelles vues en attendant la fin de l'installation par Planchon de l'usine de Pellicules françaises. Le tournage et la diffusion de films à grande échelle vont alors pouvoir commencer.

Cette invention est une révolution en ce qu'elle constitue les débuts du cinéma d'aujourd'hui et participe à la diffusion d'une culture populaire.

Expositions internationales

Les expositions internationales sont de grandes expositions publiques tenues régulièrement à travers le monde depuis le milieu du XIXe siècle. La première se déroule à Londres en 1851 puis New York en 1853 et Paris en 1855. Il faut cependant attendre 1872 pour qu'elle arrive à Lyon.

L'exposition internationale de Lyon en 1872 se déroule au sein du parc de la Tête d'Or durant 5 mois puis en 1894, Sadi Carnot inaugure l'Exposition universelle internationale. Ce ne sont pas des expositions horticoles à part entière, puisque l'horticulture et les jardins n'occupent que la moitié de l'espace, elles permettent aussi de montrer la gloire et la puissance de l'empire français sur la scène internationale. Celle de 1872 ne fut pas vraiment couronnée de succès. Dans l'imagerie collective, on retient plus facilement celle de 1894 qui était centrée sur le plan colonial et organisait des « zoos humains » afin de faire connaître aux habitants de la métropole les différents aspects des colonies.

Pour l'époque, ces événements constituent un réel divertissement populaire et on y vient de toute part admirer « la gloire de la France ».

Lyon au XIXe siècle est une ville troublée à bien des égards, d'abord sur le plan social puis sur le plan politique mais, malgré ces années de lutte, la ville n'est pas réfractaire au progrès et permet la naissance de nombreuses technologies encore actuelles aujourd'hui comme le bateau mouche ou le cinématographe. Cependant, à l'orée du premier conflit mondial, la vie va changer dans l'ancienne capitale des Gaules.

Lyon dans la Première Guerre mondiale

Au XXe siècle, la vie à Lyon est mouvementée par deux fois en raison des deux guerres mondiales. Le calme est aujourd'hui revenu et la ville connait encore une évolution urbaine surprenante. Si les évènements de Sarajevo semblent d'abord lointains, l'engrenage des alliances et les déclarations de guerre successives vont surprendre les Lyonnais alors que l'Exposition internationale de 1914 bat son plein.

L'éclatement de la guerre au cœur de l'été 1914 est une réelle surprise pour les populations européennes. En région lyonnaise, l'actualité était dominée par le triplé des Mercedes lors du Grand prix de France automobile de Lyon et par l'Exposition internationale installée dans les nouveaux bâtiments dessinés par l'architecte Tony Garnier (La futur Halle Tony Garnier). Parmi les exposants, on trouve notamment les pavillons de ceux qui vont devenir quelques semaines plus tard des ennemis jurés : les allemands et les autrichiens. Les pavillons seront par la suite abandonnés lors de la déclaration de conflit et les biens y étant exposés seront récupérés par les lyonnais.

Le maire Edouard Herriot va prendre très à cœur son rôle de gestionnaire du quotidien en ce temps de crise. Conscient de l'importance de ce conflit, il crée un fond de guerre rassemblant une documentation internationale sur celui-ci.

Lyon, de par sa situation géographique, est une ville de l'arrière, loin du front et des tranchées. Cependant, cette distance avec les zones de combats n'en fait pas pour autant une ville paisible et indifférente à la guerre. Elle est mobilisée toute entière pour répondre à l'effort de guerre et sa population vit véritablement au rythme du conflit.

Le front

Les liens avec le front sont fréquents, ils sont visibles à travers les lettres, livres, journaux qui donnent des informations à la population. Lyon est également une ville de passage pour les permissionnaires ou encore les blessés.

Lorsqu'ils étaient appelés sous les drapeaux, les soldats n'avaient pas l'occasion, ou alors très rarement, d'entrer en contact avec les civils. Va alors s'installer, entre 1915 et 1916, un système de permission qui est destiné à soutenir le moral des combattants. Lyon va alors devoir s'organiser fasse à l'arrivée massive de permissionnaires et des baraquements sont installés à proximité de la gare de Perrache pour offrir un accueil aux soldats trop éloignés de leurs familles.

Si elle voit passer bon nombre de permissionnaires, la ville est également un centre d'échange des prisonniers de guerre. On trouve en effet environ 100 000 prisonniers allemands qui travaillent à Lyon sur les chantiers du Stade de Gerland et de l'hôpital de Grange-Blanche. Des conventions prévoyaient également la possibilité, pour les prisonniers blessés, d'être renvoyés dans leur pays d'origine. La proximité de Lyon avec la Suisse va alors en faire la principale plaque tournante de l'accueil des prisonniers blessés de retour d'Allemagne et les prisonniers allemands sont ainsi stationnés à proximité de la gare de Perrache, à l'école du service de santé aux armées.

Lyon se mobilise énormément pour soigner les blessés, ce qui lui donne le surnom de « ville hôpital ». On trouve des hôpitaux militaires comme celui de Desgenettes mais les hôpitaux municipaux sont également réquisitionnés afin de soigner les hommes venus du front, notamment l'Hôtel dieu, et l'on voit la création d'hôpitaux supplémentaires voire d'hôpitaux bénévoles. La chirurgie va alors connaître de grandes évolutions et à Lyon, Albéric Pont va développer la chirurgie maxillo-faciale pour les gueules-cassées. Les frères Lumières œuvrent également pour la radiographie et le soin des blessés. On crée également des écoles professionnelles pour soldats blessés ou mutilés afin de les former à de nouveaux métiers.

L'organisation de la vie à l'arrière

SI la ville est loin des champs de batailles, il reste que le quotidien des civils est marqué par la guerre et les hommes et les femmes sont mobilisés pour répondre à l'effort de guerre. Toute l'activité économique va ainsi être tournée vers elle et le quotidien s'en ressent à travers les privations, les réquisitions mais également dans la culture. La propagande est également extrêmement présente et prend de multiples formes, la guerre s'inscrit également dans le paysage et la toponymie de la ville.

Seconde ville du pays, Lyon tente de se profiler comme ville de rang international ouverte sur le monde et dès 1913, Edouard Herriot s'intéresse au congrès international des villes, on y voit alors l'occasion de promouvoir les initiatives lyonnaises en matière d'hygiène et d'action sociale. SI la guerre semble dans un premier temps mettre un coup d'arrêt à cette ouverture, le conflit va néanmoins engendrer de nouveaux flux de toutes natures et de multiples circulations notamment par les gares.

Seconde Guerre mondiale : Lyon chef-lieu de la résistance

Durant la Seconde Guerre mondiale, Lyon est située en zone libre jusqu'en 1942 mais les troupes allemandes l'occupent à plusieurs reprises dès 1940. Très proche de la ligne de démarcation, la ville va accueillir de nombreux résistants.

La résistance s'organise très tôt à Lyon et entre l'automne 1940 et le printemps 1941 apparaissent plusieurs feuilles et petits journaux clandestins. C'est à Lyon que naissent les trois grands journaux clandestins : le Coq enchaîné, Combat et Franc-Tireur, ainsi que d'importants mouvements de résistance. En 1942, Lyon est encore en zone libre et est devenue la capitale de la Résistance. C'est d'ailleurs là que Jean Moulin choisit d'y établir son poste de commandement au début de l'année 1942.

A partir du mois de novembre 1942, en réponse au débarquement allié en Afrique du Nord, l'ennemi envahit la zone sud. Le 11 novembre 1942, la Wehrmacht occupe Lyon et la Gestapo s'installe à l'hôtel Terminus situé en face de la gare Perrache. Klaus Barbie s'installe à Lyon fin 1942 et obtient en quelques jours des succès décisifs contre la résistance lyonnaise. Dès lors, Lyon perd sa primauté au profit de Paris où se regroupent les services centraux.

L'arrestation de Jean Moulin

Lyon a occupé une place importante dans l'action de Jean Moulin puisque c'est là qu'il décide d'établir son poste de commandement au début de l'année 1942. Mandaté par De Gaulle pour réaliser l'union de la Résistance, il crée à Lyon deux services clandestins communs aux mouvements Combat, Libération et Franc-Tireur : le Bureau d'information et de presse (l'agence de presse de la résistance) et le Comité général des études (prévoit les conditions politiques de la libération). Si durant cette période Jean Moulin travaille seul, en aout 1942 il doit impérativement se décharger des tâches accessoires et met alors en place son secrétariat appelé Délégation Générale. Face aux difficultés et aux dangers de la clandestinité, Jean Moulin s'est organisé une double vie et porte plusieurs pseudonymes : Joseph Mercier, Rex, Régis ou Max.

Malgré toutes ces précautions, il est arrêté par la Gestapo le 21 juin 1943 au cours d'une réunion ayant lieu dans la maison du docteur Frédéric Dugoujon, place Castellane à Caluire-et-Cuire, certainement dénoncé par un des participants. Les inculpés sont transférés à la prison de Montluc et à force de méthode, Klaus Barbie finit par supposer l'identité de Max, alias Jean Moulin, qui est transféré à Paris à la fin du mois. Malgré la torture, Jean Moulin ne parle pas et meurt des suites des horribles sévices qui lui sont imposés par la Gestapo, certainement autour du 8 juillet 1943.

La Chute de Jean Moulin déstabilise profondément l'organisation de la Résistance et ses liens avec de Gaulle à un moment où ce dernier essaie de restaurer son autorité auprès des Alliés.

Libération et procès de Klaus Barbie

Malgré tout, le débarquement a bien lieu le 6 juin 1944 et après de nombreux bombardements, Lyon est finalement libérée le 3 septembre 1944 par la 1re DB et les FFI.

Vient alors le temps de penser ses plaies et de régler ses comptes. Le chef de la Gestapo Klaus Barbie, surnommé le boucher de Lyon, a disparu et est parvenu à rejoindre la ville de Baden-Baden en Allemagne et il y restera jusqu'à la fin de la guerre. La France réclame son extradition dès 1948 mais protégé, il se réfugie en Argentine en 1951. On le retrouve néanmoins en Bolivie en 1961 sous le nom de Klaus Altmann, conseillé de la dictature militaire pour la recherche et la torture des opposants et trafiquants d'armes. Protégé par le régime du général Banzer de 1971 à 1978 puis par le nouveau régime de Luis Garcia Meza jusqu'en 1982, il est finalement expulsé de Bolivie vers la France en février 1983. Son procès commence en mai 1987. Il est jugé est condamné à la prison à perpétuité pour crimes contre l'humanité. Il meurt en prison le 25 septembre 1991.

Lyon de 1944 à nos jours

Avec le XXe siècle, l'urbanisme n'a cessé d'évoluer, modifiant le visage de la ville et l'inscrivant dans le défi de l'Europe. Grâce au développement des transports, d'infrastructures et d'équipements culturels et la création en 1960 du quartier d'affaires de la Part Dieu, Lyon acquiert sa dimension européenne. En 1968, la création de la communauté urbaine, regroupant les 54 communes limitrophes de Lyon, en fait la deuxième agglomération de France.

Le développement urbain est influencé, tout au long du siècle, par la personnalité des hommes politiques qui vont gérer la ville comme par exemple Edouard Herriot. L'effervescence architecturale juxtapose souvent, et dès le début du siècle, des témoignages de l'histoire avec des quartiers neufs et projette Lyon dans la modernité.

L'architecte Tony Garnier va équiper la ville de logements, du stade de Gerland, d'hôpitaux ou encore d'abattoirs. L'industrie, quant à elle, poursuit son ascension et la chimie se développe au sud de la ville. L'industrie pharmaceutique connait également un essor très important.

En 1960, le quartier de la part Dieu voit le jour. Le projet est pensé depuis les années 20 et il devient très vite le cœur stratégique de la métropole lyonnaise et un des moteurs de son attractivité. Un nouvel élan est donné dans les années 1980 et vise à développer les équipements structurants de la métropole et de grands travaux d'aménagement urbain sont menés sur des sites stratégiques en parallèle à une politique de valorisation du patrimoine.

Lyon et sa dimension internationale

La première gare TGV française est construite à Lyon ainsi qu'un centre d'exposition : Eurexpo. La gare multimodale de Lyon renforce encore l'ouverture sur l'extérieur et de grands travaux d'aménagement urbain sont menés sur des sites stratégiques pour la ville. Des monuments de la culture lyonnaise sont entièrement rénovés et le quartier de la part dieu devient un des grands pôles internationaux de la ville par la présence de nombreuses entreprises internationales, d'un grand centre commercial et d'une forte intermodalité.

Si la Part Dieu est encore au centre de grands projets urbains comme la tour Incity actuellement en construction et qui devrait être la tour la plus grande de Lyon, la municipalité tend aujourd'hui à déplacer les pôles d'influences vers un nouveau quartier en construction : La confluence.

Ancienne zone industrialo-portuaire, depuis 1995 le quartier est voué à de profondes mutations. Le projet Confluence a ainsi pour objectif, de doubler la superficie du centre-ville de Lyon en urbanisant la zone et en la rendant attractive. Un nouveau centre commercial à d'ailleurs été construit et la Confluence est reconnue éco-quartier par le gouvernement français. De nombreuses entreprises sont en train d'y implanter leur siège social et le musée des confluences, dont l'ouverture est prévue en décembre prochain, devrait donner un aspect culturel à ce nouveau centre.

Ville en perpétuelle évolution, Lyon est devenue, depuis une dizaine d'années, une métropole où se côtoient harmonieusement les réussites du passé et les projets d'avenir. Son histoire riche, encore visible aujourd'hui, est ancrée dans le cœur des lyonnais et au sein même de la ville. L'avenir de Lyon semble également assez intéressant en raison des nombreux projets qui sont en cours de réalisation et la ville s'inscrit de plus en plus sur la scène nationale mais également internationale.

Pour aller plus loin...

Site du patrimoine Lyonnais .

Maison des frères Lumière.

Musée Gallo-Romain de Fourvière.

Bibliographie

- André Pelletier, Jacques Rossiaud, Françoise Bayard et Pierre Cayez, Histoire de Lyon : des origines à nos jours, Lyon, Éditions lyonnaises d'art et d'histoire,‎ 2007, 955 p.

Quand Lyon s'appellait Lugdunum, d'André Pelletier. Editions Lyonnaises d'Art et d'Histoire, 2016.

- Patrice Béghain, Bruno Benoit, Gérard Corneloup et Bruno Thévenon, Dictionnaire historique de Lyon, Lyon, Stéphane Bachès,‎ 2009, 1501 p.

- Françoise Bayard, Vivre à Lyon sous l'Ancien Régime, Paris, Perrin, 1997, Coll. Vivre sous l'Ancien régime, 352 p.

- Jean-Pierre Gutton, Guide de Lyon : Renaissance, Age classique, 1500-1789, ELAH, 1995

- Jacques Rossiaud, Lyon 1250-1550. Réalités et imaginaires d'une métropole, textes réunis par J.-L. Gaulin et S. Rau, Champ Vallon, 2012.

 

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