carte france 1De nos jours, pour se promener ou pour chercher une contrée, nous utilisons le GPS, les supports sur l’internet ou éventuellement nos bonnes vieilles cartes routières. Mais qu’en était-il au temps des rois Louis XIII, Louis XIV ou encore Louis XV ?

 

Les premières cartes de la Renaissance

Au XIIIe siècle, il existait quelques cartes dessinées, mais uniquement pour les marins afin de se repérer par rapport au profil du littoral, en particulier celui de la Méditerranée, bien fourni en ports. Seulement plus tard, on s’attaquait au littoral aquitain, car il n’y avait pas de ports entre Bordeaux et Saint Jean de Luz. Cependant, toutes les cartes dessinées étaient assez fausses : les Pyrénées étant orientées Nord/Sud, par exemple ! En 1525, un professeur du Collège royal publie un ouvrage où la France est « trapue, ressemblant à un losange étiré d’est en ouest ». Catherine de Médicis demande alors à dresser une description générale et particulière du pays, mais pour cause de guerres, seuls le Berry, le Bourbonnais et la région lyonnaise seront décrits. Autre raison : l’unité de mesure et en particulier les méridiens étaient différents.

En 1550, un premier guide est constitué, mais sans aucunes cartes « le guide des Grands Chemins de France ».

Les volontés de Louis XIII et Louis XIV

carte de 1521Louis XIII estime que connaitre la géographie était très utile au bon gouvernement de son pays. Il nomme alors l’éditeur Sanson au poste de Géographe du Roi. Celui-ci se réfère aux essais du hollandais Frisius, mais les mesures étaient trop différentes et inexactes.

Sous Louis XIV, on utilise la cartographie locale conservée dans les archives des seigneurs : zones de pâtures, parcelles agricoles, calvaires et ponts. Mais pour construire Versailles, il a fallu calculer par exemple les transports et les trajets, par route ou par voie navigable, pour amener les marbres venant pour la plupart d’Espagne. D’où l’importance d’avoir une carte un peu plus détaillée !

Dans le sud de la France, P.P. Riquet a fait établir lui aussi, une carte de la région lorsqu’il a créé le canal Royal des Deux Mers pour dynamiser le Languedoc : seuls les sols et les routes sont mentionnés, mais non les distances et les altitudes. Ce n’est que lorsque Louis XIV voudra alimenter les bassins en eau du domaine de Versailles avec détournement de la Loire, qu’il faut songer aux altitudes. Des relevés géodésiques sont lancés avec des lunettes à cheveu.
Dans la foulée, une étude topographique est menée où le relief de chaque région est inscrit, ce qui est une grande nouveauté.

Le quadrillage de la France

Plusieurs éminents membres de l’Académie des Sciences (géomètres, géographes, astronomes) se lancent dans la création d’une carte de la Terre et du royaume, mais il leur faut un repère et une unité unique de mesure.
Le point de repère est établi en plaine de Vaugirard et à côté du château du Luxembourg. Le 21/06/1667, on démarre le repérage : un méridien de métal est posé au centre du plancher du 1er étage du Luxembourg. Dès lors, ce point permettra de calculer les longitudes et latitudes, devenant les mesures uniques.

L’abbé Picard réussit ainsi en 1678 à éditer une carte du royaume, servant de modèle topographique, que l’on offre à Louis XIV en 1687 sous le nom de la Table de Couplet, mais la France est un peu distordue…
Le « quadrillage de la France » va se dérouler de 1683 à 1718. On démarre à Dunkerque en direction de Collioure, on repère les points hauts comme les moulins et les clochers, afin d’établir des triangles, à l’aide de chaînes d’arpenteurs mesurant 8 mètres de long ! Les lunettes sont améliorées et munies de quart de cercles gradués et d’un fil à plomb.

Travaillant la nuit, un feu est allumé dans l’axe de chaque lunette, permettant de calculer le positionnement au sol grâce aux satellites de Jupiter, pour obtenir un arc méridien en fonction de la courbure du globe terrestre.

Les grandes améliorations sous Louis XV

carte languedoc 1668Le jeune monarque est à bonne école avec ses précepteurs : Cassini et l’astronomie, Delisle et la géographie. Fasciné par l’astronomie, Louis XV transforme le château de la Muette en observatoire personnel. S’intéressant aussi à la géographie et aux techniques de repérage au sol, il fait aménager en 1722 une galerie de géographie dans les combles du château de Versailles.

Le successeur de Delisle, Bourguignon d’Anville pousse son élève à établir une description de la France : plan géométrique détaillant les ressources locales et topographie détaillée. Afin que les expéditions maritimes de 1733 se passent correctement, il est nécessaire de recalculer le degré de l’arc méridien. On remarque alors des erreurs et la longueur du méridien de Dunkerque à Collioure est réactualisée. Ce travail va durer onze ans.

En 1744, une nouvelle carte de la France est éditée, à l’échelle de 1/86400è avec une précision de 464.34m…et surprise la France est plus grande que prévue. Pendant ce temps, le roi fait dessiner une carte de ses cinq résidences royales, avec mention des chemins, des routes, des parcelles agricoles, du réseau hydrographique, de la plantation des jardins, un peu à la manière des futures cartes d’état-major.

L’utilité des cartes

La guerre de Succession d’Autriche pousse le roi à obtenir la carte des régions investies et les dessins des champs de batailles. Comme ces relevés sont rapidement exécutés, il demande « que la carte de mon royaume soit levée de même ». Le devis s’élève à 90 000 livres sur dix ans, fournissant quinze planches par an. Le budget est accepté et les travaux avancent vite. En trois années, on peut voir les frontières de Dunkerque à Metz, le littoral de Dunkerque à Cherbourg et la généralité de Paris.

Mais la guerre de Sept ans va faire réduire le budget. Une liste de huit particuliers se constitue sous la houlette de Mme de Pompadour pour subvenir aux besoins de ce travail et apportent leurs capitaux. Le roi leur donne son accord et leur abandonne la propriété intégrale des plans, cartes et dessins : il a le bonheur de voir les premiers dessins en 1756.

Les Européens se mettent aussi à composer des cartes : l’Angleterre et l’Irlande en 1763 emploieront une échelle constante, permettant l’exactitude des proportions et des distances, ainsi qu’une multitude de détails très précis. Ces cartes ont une autre utilité : en 1773, elles permettront d’établir une carte épidémiologique. Elles seront aussi utiles à Marie Antoinette lorsqu’elle situera et prévoira les relais, détaillera l’itinéraire pour la fuite à Varennes.

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