Le Vaux-le-Vicomte de Fouquet
Devenu surintendant des Finances en 1653, Nicolas Fouquet, à la tête d’une fortune immense, décide de se faire bâtir une demeure digne de sa position. Trois artistes au talent confirmé — l’architecte Louis Le Vau, le peintre Charles Le Brun et le jardinier-paysagiste André Le Nôtre — sont chargés d’édifier sur la seigneurie qu’il possède en Brie française un domaine sans précédent en France. À partir de 1656, 18 000 ouvriers participent, durant cinq ans, à l’édification du château et de son parc : pour mener à bien le projet, trois villages sont rasés, dont celui qui donne son nom au château ; une manufacture est créée dans le village voisin de Maincy pour le tissage des tentures. Fouquet, en maître d’ouvrage avisé et mécène ayant un grand goût artistique avec l’instinct du beau et du délicat, acquiert le domaine de Vaux-le-Vicomte en 1641. Aidé et entouré par Le Nôtre, Le Brun et Le Vau, tous les quatre sont de la même génération et s’installent à domicile pendant les travaux.
Les jardins sont créés avant la construction des bâtiments, comme dans beaucoup de résidences. Fouquet demande la construction d’une basse-cour, d’un parterre, d’un potager et d’un fruitier. Le Nôtre s’attèle à la création de trois parterres (axe nord-sud, parterre de broderies, parterre de gazon) et un axe transversal ouest-est avec bassin et potager. A l’est, on parcourt les parterres de broderies, de la couronne, la grille d’eau avant d’arriver à la grotte et aux cascades. Après l’acquisition de l’étang de Vaux, les jardins sont agrandis vers le sud et le grand canal est creusé. Plus de 1000 m séparent le château du bout des jardins avec la statue d’Hercule en point d’honneur, au-dessus de la grotte.
Après l’arrestation de Fouquet pour détournement de fonds en 1661, le domaine va sommeiller. Sa veuve finit vend les terres, les seigneuries de Melun et Vaux-Le-Vicomte. Le maréchal de Villars, élevé duc par le roi vers 1705, rachète les propriétés, change le nom en Vaux-Villars ainsi que les armes sur le fronton de la propriété. En 1714, son épouse Jeanne Angélique y anime un salon où se bousculent la bonne société et les beaux esprits.
Dans les mains des Choiseul-Praslin
A la mort des Villars (lui en 1734, elle en 1763) le domaine revient à leur fils. Le duc de Villars étant criblé de dettes, revend l’ensemble un an plus tard aux Choiseul-Praslin, cousins du duc de Choiseul, principal ministre de Louis XV.
Les armes sont bien évidemment changées sur le fronton ; le rez-de-chaussée est conservé, mais au 1er étage, les chambres carrées deviennent de petits appartements.
En juin 1875, trois lots sont composés : le château, le parc, les dépendances et une ferme ; une ferme de 140 hectares ; enfin, une ferme de 200 hectares.
Les restaurations de la famille Sommer
Par crainte d’être mal vendu ou vendu séparément, le préfet de la région s’adresse à son ami Alfred Sommer, amateur d’art et cultivé, qui acquiert l’ensemble du domaine pour 2 275 400 francs or. Plus de 5 000 000 francs or seront nécessaires pour tout remettre en état.
Les Sommer s’y installent pour la première fois en juillet 1877, en été et en automne, retournant à Paris pour l’hiver. Ce sera ainsi jusqu’en 1940. La tâche est rude, les jardins sont en friche. Heureusement, il reste les dessins établis du temps de Nicolas Fouquet. Tout va être restauré : les cascades, la grotte, la grille d’eau, et la statue d’Hercule réinstallée dans l’axe nord-sud au-dessus de la grotte.
Son fils Edme poursuit le remeublement du château, achète des tableaux dont un portrait de Nicolas Fouquet, s’occupe du parterre des borderies, mais toujours avec le souci de bonne gestion des finances du domaine. La 1ère guerre mondiale ne va pas faire de dommage : Edme est incorporé comme chauffeur automobile, pendant que son épouse installe un hôpital dans les communs : 1115 blessés y seront soignés. Elle sera félicitée par Clémenceau puis par Foch et recevra en 1918 la croix de guerre.
A la mort d’Edme Sommer en 1945, les biens sont partagés entre les quatre neveux et nièces. Son épouse reste usufruitière et continue à s’occuper de la gestion du domaine, alors que Jean de Vogüé devient propriétaire de Vaux-le-Vicomte.
Vaux-le-Vicomte de père en fils
En 1990, le château est ouvert à la belle saison où sont organisées des soirées chandelles avec 2000 bougies et un feu d’artifice. Vers l’an 2000, 50 films et téléfilms ont eu pour décor le domaine de Vaux ; bien que leurs histoires se situent à Versailles, les productions préfèrent le cadre de Vaux pour le tournage… Depuis 2005, une journée « Grand Siècle » a lieu annuellement avec déjeuner sur l’herbe, démonstration de fauconnerie, costumes marquant l’art de vivre à la française.
Suivons les visiteurs et entrons maintenant dans ce magnifique domaine. Franchissons le portail et les grilles monumentales, traversons l’avant-cour et montons les 20 marches du perron…le vestibule et le salon ovale nous accueillent chaleureusement. Laissons-nous transporter dans ce chef d’œuvre de l’architecte française, célébrant la puissance et la gloire de Fouquet. Découvrons l’appartement d’apparat au rez-de-chaussée, puis la bibliothèque actuelle (antichambre de l’appartement du roi au temps de Louis XIV) étant l’une des plus belles pièces du château avec ses sublimes plafonds à la française et à l’italienne, richesse de Vaux-le-Vicomte. Enfin, du salon ovale, accédons aux jardins, tels que les avaient dessinés le Nôtre, il fut un temps…
Pour aller plus loin
- Le château de Vaux-le-Vicomte, de Jean-Marie Pérouse de Montclos. Scala, 2016.
- Un jour à Vaux-le-Vicomte, des frères Vogüé. Flammarion, 2015.