massacres 1792 1Les massacres de septembre 1792 sont une suite d’exécutions massives de prisonniers au cours de la Révolution française (2-6 septembre 1792). Dans le contexte de la chute de la monarchie et des défaites militaires sur le front de l’Est, les prisons parisiennes s’étaient emplies de “suspects” supposés coupables de trahison. Encouragés par les journaux révolutionnaires comme l’Ami du peuple de Jean-Paul Marat, les parisiens s’en prennent sommairement aux détenus. Au total, le bilan des exécutions s'élève à environ 1 300 morts, touchant autant les suspects contre-révolutionnaires que les filles publiques et les condamnés de droit commun.

 

Un climat de vengeance et d’insécurité

Depuis la chute de la royauté, le 10 août 1792, la Commune insurrectionnelle de Paris, chaque jour plus véhémente, cherche à imposer ses vues à l’Assemblée législative. Dès le 11 août, sous la pression de la Commune, cette dernière doit autoriser les municipalités à rechercher les crimes contre la sûreté de l’État, et à opérer des arrestations provisoires. Le 17 août, malgré ses réticences, l’Assemblée vote de la même manière la constitution d’un tribunal criminel extraordinaire, constitué de juges élus par les sections parisiennes, pour juger les contre-révolutionnaires. Le 28 août enfin, elle autorise la municipalité à procéder à des visites au domicile des suspects, pour y rechercher des armes. D’autres mesures ont été prises contre les émigrés, leurs familles, et les prêtres réfractaires.

Un régime de terreur s’installe, 500 personnes environ sont conduites, au cours du mois d’août, aux prisons de la Force, de l’Abbaye de Saint-Firmin ou enfermées aux Carmes. Les mesures prises le 28 août entraînent environ 3000 arrestations. Cependant, alors que La Fayette a déserté les armées de la République, les Prussiens envahissent le territoire français et prennent Longwy, le 23 août. Le 1er septembre, Marat, l’Ami du Peuple, fait placarder des affiches réclamant la justice directe par le peuple. Les «traîtres» doivent être supprimés avant que les patriotes ne partent vers les frontières. L’effervescence grandit dans la capitale et atteint son point culminant le 2 septembre, à l’annonce de la capitulation de Verdun.

Le Comité de surveillance de la Commune prend alors un arrêté enjoignant, au nom du peuple, de juger les suspects avant de les exécuter. Des tribunaux populaires sont improvisés. On traîne devant eux les malheureux prisonniers, qui sont massacrés à la sortie. La Force, la Conciergerie, le Châtelet, Bicêtre, la Salpêtrière, Saint-Firmin et la Tour Saint-Bernard, jusqu’au 6 septembre, reçoivent eux aussi la visite des exécuteurs.

Les massacres de septembre 1792

La tuerie spontanée commence lors du transfert de prisonniers du Palais de justice à l’abbaye Saint-Germain, transformée en prison pour l’occasion. La plupart des prisonniers sont des prêtres qui ont refusé de prêter le serment d’allégeance à la Constitution civile du clergé, et la seule vue de vêtements ecclésiastiques suffit à enflammer les esprits. Vingt-trois prêtres sont tués avant même que le convoi de prisonniers n’ait atteint l’abbaye, bientôt prise d’assaut. La foule attaque ensuite la prison installée dans le couvent de carmélites de la rue de Vaugirard. En moins de quatre heures, 116 des 158 prêtres incarcérés dans le couvent sont exécutés après de sommaires jugements populaires.

massacres 1792 2La tuerie la plus longue a lieu dans l’Hôtel de la Force, rue du Roi-de-Sicile, où l’occupation des lieux dure plusieurs jours (du 2 au 6 septembre). Des 500 prisonniers qui s’y trouvent, 110 sont des femmes, la plupart incarcérées pour des délits de vol ou de prostitution — 9 d’entre elles sont des prisonnières politiques. La princesse de Lamballe qui, après avoir émigré, est revenue aux côtés de Marie-Antoinette, est abattue sans pitié, son corps dépecé. Les émeutiers plantent sa tête sur une pique et vont la promener au Temple, sous les fenêtres de Marie-Antoinette, en hurlant «La Lamballe, l’Autrichienne ! La Lamballe, l’Autrichienne ! »

Les autorités assistent au carnage, muettes. L’Assemblée envoie une délégation à la Commune. Accueillie par des injures, elle se retire dignement. Danton, le ministre de la Justice ne fait rien pour protéger les prisonniers, ni pour tenter de les sauver. Les Girondins, en particulier Madame Roland, le tiendront, avec Marat, pour responsable du massacre.

La province suit l’exemple parisien, plus ou moins vigoureusement. A Meaux, Reims, Caen, Gisors, où périt le duc de La Rochefoucauld, à Versailles, où sont tués l’évêque de Mende et le duc de Brissac, les massacres font d’autres victimes. Dans le pays, même si certains frémissent d’horreur, l’opinion regarde les massacres de Septembre comme une action juste, une défense contre l’invasion, la trahison, la contre révolution. A l’étranger, on considère avec indignation et horreur cette première manifestation de la Terreur. 

Pour aller plus loin

Les Massacres de Septembre, de G. Lenotre. Tallandier, 2017.

- Septembre 1792 : logiques d'un massacre, de Frédéric Bluche. Laffont, 1986.

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