europe mythologie grecqueEurope, dans la mythologie grecque, est une princesse phénicienne, fille du roi de Tyr Agénor et amante du roi des dieux : Zeus / Jupiter. Cette figure de la culture classique mise à l’honneur dans les Métamorphoses du poète Ovide, est peu connue du grand public et des médias qui la qualifient abusivement de « déesse », ce qui reflète plus leur culte de l’argent que la tradition mythologique. À l’aube de notre ère, le poète romain Ovide arrivant sur ses quarante ans délaisse la poésie érotique pour se lancer dans l’écriture de ses fameuses Métamorphoses, quinze chapitres en vers voguant dans les mythologies grecques et romaines. C’est dans le second chapitre qu’il nous parle dy mythe d’Europe, reprenant les éléments d’une légende bien plus ancienne.

 

Europe, une princesse mythique

Dans le poème d’Ovide, Europe est la fille d’Agénor, le roi de Tyr. Tyr est alors une ville phénicienne, située dans l’actuel Liban à 70 km au sud de Beyrouth. Très intéressé par la jeune princesse, le roi des dieux Jupiter ordonne à son fils Mercure (né de l’adultère entre Jupiter et la nymphe Maïa…) de faire paitre ses troupeaux dans le pays de Sidon, capitale de la Phénicie, près du rivage où la princesse a pris pour habitude de jouer avec ses amies. Ceci fait, Jupiter se métamorphose en taureau blanc et se mêle au troupeau pour approcher incognito celle qui aiguise ses désirs.

Bramant, se pavanant, mettant en valeur sa blancheur immaculée et sa massive musculature animale, il attire l’attention des jeunes filles étonnées de voir un si bel animal si peu farouche. La princesse Europe s’approche de lui, lui tend des fleurs, le taureau fait le beau, se fait caresser et lui lèche les mains. Mise en confiance, la jeune fille commence à le couvrir de guirlandes et finit même par monter sur son dos… C’est alors que le taureau s’élance dans la mer, s’éloignant du rivage avec sa captive…

…devenue reine crétoise

enlevement europeLa suite de l’Histoire n’est pas racontée par Ovide, mais dans la tradition gréco-romaine on raconte généralement qu’Europe fut déposée sur l’île de Crète. Là, Jupiter reprend une apparence anthropomorphe et s’unit charnellement à la jeune princesse. La princesse tombe enceinte de triplés : Minos, futur roi de Crète, Rhadamanthe et Sarpédon. Europe n’étant qu’une de ses multiples conquêtes, Jupiter ne s’attarde pas avec elle, mais lui offre néanmoins comme époux le roi de Crête Astérion.

Quelques mois plus tard naquirent Minos le roi légendaire de l’île de Crète (dont l’épouse Pasiphaé s’unira par la suite à un autre taureau blanc pour donner naissance au Minotaure) et Rhadamanthe qui devinrent tous les deux juges des Enfers, mais aussi Sarpédon qui participera à la guerre de Troie et sera tué par Patrocle.

Fou de chagrin suite à la disparition de leur fille, le roi Agénor ordonna à ses fils de chercher la disparue et de ne revenir qu’avec elle. Cadmos partit avec ses deux frères Thasos et Cilix et sa mère Téléphassa. Il chercha longtemps, en vain, et finit par fonder sa propre ville, Thèbes, sur le conseil de l’oracle de Delphes. Thasos s’installa dans les îles de Thraces. Cilix s’installa en Cilicie. Quant à la reine Téléphassa, elle mourut de chagrin…

De la mythologie à la postérité européenne

La scène de l’ enlèvement d’Europe a eu un très grand succès, on la retrouve en littérature, dans les arts, en astronomie (constellation du taureau)… Plus généralement elle y tient une place importante dans l’art du continent européen, et se taille une place de choix de nos jours dans la symbolique de l’Union Européenne qui évite les références à la culture judéo-chrétienne, lui préférant une culture gréco-romaine.

europe cratere louvrePourtant, Europe est une princesse proche-orientale implantée de force en Crète, véritablement aux marges donc de ce qu’on considère généralement comme le continent européen. Alors pourquoi a-t-elle donné son nom au continent ?

En fait, la question se pose autrement, puisqu’il semblerait que le mot « europe » utilisé pour désigner notre continent ait une origine sémitique, « ereb », qui ferait référence au soleil couchant. L’étymologie du mot fait encore débat, mais cette explication ferait donc du mot « europe » une dénomination avant tout géographique à partir d’un monde centré sur l’Est de la Méditerranée. L’assimilation du nom du continent à celui de la princesse ne serait alors qu’une tentative d’explication plus tardive pour lier le continent à la culture grecque.

La princesse Europe et son taureau blanc avaient déjà conquis les portes-monnaies de la zone euro sur les pièces grecques de 2€. Le portrait de la mythique princesse phénicienne est à présent visible sur les nouveaux billets de 5€, même si elle reste difficilement identifiable en l’absence de taureau et de couronne, deux éléments qui apparaissaient sur la pièce de 2€. Peu à peu, toute la série de billets « architecture » va être remplacée par la série « Europe » avec l’effigie de la princesse.

Pour réaliser son dessin, le graphiste allemand Reinhold Gerstetter s’est inspiré d’un cratère en cloche à figures rouges du IVe siècle av. J.-C. peint par celui que l’on appelle le peintre de l’Ilioupersis. Ce cratère produit en Pouille fut découvert à Tarente et est aujourd’hui exposé au Musée du Louvre à Paris.

Pour aller plus loin

Mythologie grecque et romaine, de Pierre Commelin. Pocket Histoire, 2018.

A la recherche d'Europe - Petites histoires de la mythologie. Nathan, 2019.

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